La mondialisation, malgré ses promesses techniques infinies, n'a pas réduit nos difficultés à communiquer. Perdu dans les solitudes interactives, chacun cherche l'Autre, hélas, rarement au rendez-vous. Négocier. Cohabiter. Tout pour éviter l'échec de l'acommunication et le risque de guerre. L'Europe en est la paradoxale illustration. Jamais d'accord, mais toujours ensemble. La communication, on l'a rêvée parfaite, technique et immédiate, elle se révèle fragile, politique et humaine. La communication, au fond, c'est toujours le risque de l'Autre.
La communication est l'un des symboles forts de notre époque.
Son idéal, rapprocher les hommes, les valeurs et les cultures, est au coeur du modèle démocratique et triomphe par l'intermédiaire de techniques de plus en plus performantes et séduisantes. sa réussite est à ce point exemplaire que nombreux sont ceux qui voient dans le multimédia et les réseaux la réponse aux maux de nos sociétés et l'esquisse de nouvelles solidarités. dominique wolton nous met en garde contre ces conclusions hâtives : s'il n'y a pas de démocratie sans communication, les techniques génèrent aussi des inégalités.
Quand la communication technique se déploie, il n'est pas rare que la communication humaine s'appauvrisse. penser la communication, c'est montrer les dangers qui la menacent et dont il faut la protéger, renforcer les identités, retrouver le temps et respecter ce qui nous sépare. bilan de vingt ans de recherches sur la télévision, la culture, la communication et la politique, le journalisme, les nouvelles techniques et l'europe, ce livre enthousiaste mais lucide nous invite à pratiquer la distance au coeur de la communication.
En 35 ans, Dominique Wolton a travaillé sur 10 domaines de recherche qui éclairent l'avenir : l'individu et le couple ; le travail ; les médias ; l'espace public et la communication politique ; l'information et le journalisme ; Internet ; l'Europe ; la diversité culturelle et la mondialisation ; les rapports sciences-techniques-société ; connaissance et communication.
En abordant ces thèmes à contre-courant des idées du moment, il a témoigné de sa lucidité et de son intuition. Ses recherches contribuent notamment à valoriser une conception originale de la communication qui privilégie l'homme et la démocratie plutôt que la technique et l'économie. En repensant les rapports entre l'individu et le collectif, entre le même et le différent, il renouvelle la pensée politique à l'heure de la communication omniprésente.
« Avec la mondialisation de l'information, le moindre événement est rendu visible, et apparemment plus compréhensible. Pour autant, il n'y a pas de lien direct entre l'augmentation du nombre d'informations et la compréhension du monde. Telle est la nouvelle donne du siècle qui s'ouvre : l'information ne crée pas la communication.
Voici donc le point de départ du XXIe siècle : la rupture entre information et communication, la difficulté de passer de l'une à l'autre. On savait les cultures différentes, mais on pensait que la même information pouvait être plus ou moins acceptée par tous. On s'aperçoit du contraire : un fossé se creuse entre information et communication. Cette vérité empirique, on l'avait découverte, parfois douloureusement, au niveau des États-nations ; on la retrouve plus nettement à l'échelle du monde. C'est un certain modèle universaliste - en réalité occidental -de l'information et du lien entre information et communication qui s'effondre. »
Dominique Wolton
A quoi sert la télévision ? A rapprocher des publics par ailleurs séparés les uns des autres dans une société où chacun est enfermé chez soi. Là réside le génie de la télévision: faire participer chacun individuellement, librement, gratuitement à cette activité collective, partagée simultanément par le plus grand nombre. Elle est le lien social par excellence de la démocratie de masse. Car du haut en bas de l'échelle sociale, chez les riches comme chez les pauvres, les urbains et les ruraux, les jeunes et les vieux, tout le monde regarde la télévision. Et en parle. Telle est la thèse centrale du livre, qui vise à montrer l'importance de la télévision du point de vue démocratique. Pour cela, il faut critiquer les idéologies, techniques, politiques et économiques, qui l'enserrent et l'étouffent, privilégier la télévision généraliste qui s'adresse au grand public et se méfier des télévisions thématiques qui, sous couvert de satisfaire les publics, ne font que reproduire les inégalités sociales et culturelles. La télévision est un formidable outil d'émancipation politique et culturelle, aussi important pour l'avenir de l'Europe que l'éducation, la culture et la recherche. A condition de susciter des politiques plus ambitieuses que les modes dont elle est l'objet.
L'Europe n'est pas un rêve dépassé au bilan décevant. Non, elle n'est pas déclassée par le glissement des pouvoirs vers une Asie toute-puissante.
Elle reste la plus grande aventure pacifique et démocratique de l'Histoire. Réussir à faire cohabiter plus de 500 millions d'individus divisés par d'innombrables contentieux, avec 27 nationalités différentes et parlant plus d'une vingtaine de langues, et ce depuis soixante ans, n'est pas une réussite négligeable. Mais comment cela est-il possible ?
C'est que les membres de l'UE persévèrent dans le dialogue, malgré les contentieux, les désaccords et les tensions, grâce à ce que Dominique Wolton nomme l'« incommunication ». Et c'est bien là que réside toute sa force, et son avenir.
Faisant suite au volume consacré aux « révolutions de l'expression » au xxe siècle, la présente livraison analyse la communication comme une discipline et un objet propre ayant connu, tout au long de cette période, des ruptures et des filiations. À partir de terrains toujours plus vastes et nombreux, ses concepts, écoles de pensée et paradigmes théoriques témoignent de la diversité de ses préoccupations et orientations, mais aussi de problématiques communes et de thématiques récurrentes. Les conflits et controverses qui la traversent attestent de sa vitalité, sans pourtant exclure des impensés - et parfois même des sacrifices - en des temps de sur-événementialité médiatique et d'idolâtrie technique.
Appelant une saisie interdisciplinaire aussi difficile que nécessaire, l'étude de la communication est rendue d'autant plus complexe - et son savoir plus fragile - que son objet même engage, rencontre et bute sur une inconnue majeure : l'altérité. Diversité culturelle, mondialisation et dynamiques identitaires locales ou globales, individuelles ou collectives en sont les marqueurs aujourd'hui évidents. L'ensemble invite alors à revenir sur les rôles et responsabilités des acteurs et pose, plus généralement, la question de toute forme de participation et d'engagement, public ou non.
La communication, prise entre injonction sociale et liberté d'expression de chacun, est-elle gage d'une meilleure compréhension de tous ? L'incommunication reste en tout cas son horizon. Elle guette toute parole et tout échange, ordinaire ou officiel. L'épreuve de l'autre est toujours au risque de soi. C'est sans doute dans cette réalité première mais constitutive de la condition humaine que réside, sur fond d'incertitude croissante au xxe siècle, l'enjeu fondamental de la communication.
En bref La langue de bois au filtre de la communication.
Le livre Discours fleuves des dictatures ou prose convenue et contournée des politiques de nos démocraties, la " langue de bois " se retrouve partout et dans des formes et des sens variés. Plus qu'une simple convention sociale permettant d'atténuer une vérité désagréable, entre politesse et hypocrisie, la langue de bois, tel le newspeak d'Orwell (1984), sert parfois à énoncer exactement le contraire de ce qu'elle dit, pour anéantir toute communication.
Dans ce numéro d'Hermès, des spécialistes reconnus étudient l'éventail de ces discours, cherchant à définir la ligne de partage qui fait cette langue " de bois ", ses modalités de production, et la répartition des rôles entre récepteur et locuteur au cours de ce phénomène.
Ce sujet est un enjeu majeur des recherches en sciences de la communication. Car au détour des ces langues de bois apparaissent en effet les ratés du message, les signes de dysfonctionnement des médias. Et l'on s'aperçoit au final que la langue de bois peut, paradoxalement, constituer un des moteurs de la communication, révélateur évident de sa complexité et son originalité.
Sous la direction de Dominique Wolton.
Coordonnateurs : Joanna Nowicki, Michaël Oustinoff, Anne-Marie Chartier.
Arguments - Thématique innovante.
- Cible élargie : Sciences politique, linguistique.
La seule vraie révolution de ces 50 dernières années est celle de la communication.
Plus de messages, plus de diffuseurs, plus de récepteurs. plus vite, plus loin. nous sommes les acteurs de ce bouleversement. la communication est omniprésente et de plus en plus inséparable des techniques.
Surpuissante communication ? pas si sûr. hier, alors que les techniques étaient encore balbutiantes, la communication brillait du même éclat que la liberté, l'égalité ou la fraternité au fronton des valeurs démocratiques.
Aujourd'hui triomphante, elle s'est banalisée, et hésite entre une idéologie faussement consensuelle et une caricature féroce de la modernité. pourtant, personne ne peut s'en passer. il faut sortir la communication du leurre de la surpuissance. rappeler, modestement et obstinément, sa dimension humaniste. l'avenir de la communication n'est pas dans le triomphe des techniques et des marchés, mais dans le risque de la rencontre et de l'incompréhension.
Communiquer, c'est accepter la cohabitation avec l'autre, le pari de l'échange, l'épreuve de l'incommunication. pour éviter que le village global devienne une immense tour de babel, il faut apprendre à cohabiter. et sauver la communication, cet idéal humaniste qui est aussi l'un des grands enjeux de la paix ou de la guerre au xxie siècle.
Pour penser le passage des médias de masse aux nouvelles techniques de communication, il faut replacer celles-ci dans une théorie générale de la communication, qui mette en rapport l'évolution technique avec les dimensions culturelles, politiques et sociales de la communication. Selon l'auteur, le Web risque d'encourager une communication illusoire : virtuelle, atemporelle, individualiste...
Cinq continents, 133 pays, 4360 auteurs, 4650 notices bibliographiques : pour la première fois réunis dans un livre les principaux auteurs écrivant en français depuis 1990 et dans le monde entier, dans les domaines des littératures et des sciences humaines et sociales. Placée sous la direction de Dominique Wolton, une équipe de 22 chercheurs et universitaires avec plus de 90 correspondants à l'étranger.
Avec l'ouverture des frontières, la télévision, la démocratisation des voyages et plus récemment Internet, le monde se serait mué en un gigantesque «village». C'est, du moins, ce que veulent faire croire les puissantes industries de la communication : nous serions tous «citoyens du monde», multi-branchés, capables d'assimiler les héritages les plus divers, bricolant dans la bonne humeur une sorte de culture mondialisée. Rien de plus vain que cette prétention cosmopolite. Pour affronter un monde toujours plus ouvert, et donc plus incertain, il faut au contraire être confiant dans son identité, prêt à se confronter à d'autres valeurs. Ce n'est pas parce que l'Autre est aujourd'hui plus accessible qu'il est plus compréhensible, c'est même précisément l'inverse. Plus nos différences sont visibles, plus elles créent des tensions. Curieusement, alors qu'on ausculte à la loupe la mondialisation économique, on oublie de penser cette «autre mondialisation» dont dépendent pourtant la paix et la guerre de demain. À quelles conditions, donc, organiser au niveau mondial une cohabitation des cultures ? C'est la question centrale de ce livre et, pour Dominique Wolton, l'un des principaux enjeux politiques d'aujourd'hui.
" ce qui m'intéresse dans la communication, dans la mesure où elle ne réussit pas toujours, puisque l'émetteur est rarement en ligne avec le récepteur, c'est de pouvoir gérer ce décalage.
C'est parce que celui-ci existe que l'on se parle, se répond. en quoi consiste la communication ? je te parle, tu ne m'écoutes pas, tu ne me comprends pas et tu me réponds. c'est une sorte de dialogue de sourds, le jeu de l'incommunication. mais cette incommunication fonde l'être humain. on passe son temps à se remettre en déséquilibre pour se remettre en position de dialoguer. communiquer c'est cohabiter.
" dominique wolton.
La construction de l'Europe économique et l'ouverture des frontières doit conduire à la naissance de l'Europe démocratique. Celle-ci ne peut exister que par une fantastique révolution des mentalités. C'est ce que montre l'auteur, spécialiste des questions de communication et de politique.
Fait le point sur la "révolution" Internet, sur sa logique politique et économique, sur les modes de transmission de l'information et des savoirs et sur les mirages d'une communication surpuissante.
En 35 ans, Dominique Wolton a travaillé sur 10 domaines de recherche qui éclairent l'avenir.
L'individu et le couple ; le travail ; les médias ; l'espace public et la communication politique ; l'information et le journalisme ; Internet ; l'Europe ;
La diversité culturelle et la mondialisation ; les rapports sciences-techniques-société ; connaissance et communication.
Tous ces thèmes, au coeur des débats contemporains, il les a le plus souvent abordés à contre-courant des idées du moment, témoignant de sa lucidité et de son intuition.
Ses recherches contribuent notamment à valoriser une conception originale de la communication qui privilégie l'homme et la démocratie plutôt que la technique et l'économie. Avec cette question fondamentale : comment cohabiter pacifiquement avec l'autre, aujourd'hui si proche grâce à la multitude des techniques, mais toujours aussi éloigné ? En repensant les rapports entre l'individu et le collectif, entre le même et le différent, il renouvelle la pensée politique à l'heure de la communication omniprésente.
Le Musée est devenu l'un des lieux incontournables de la culture et de sa transmission.
Hermès livre ici un éclairage original, non-conformiste, sur cette institution incontournable.
L'équipe de Dominique Wolton revient sur les différentes mutations, sur l'essor des musées, mais surtout s'intéresse aux formes et aux transformations de cet espace de communication.
Ce numéro questionne le rôle esthétique des musées, leur jeu sur les marchés de l'art, leur fonction de sacralisation d'un art officiel et universel, et en contre point, le débat et les critiques des autres cultures qui voudraient, ou refusent, d'y entrer.
Il interroge également la place des exclus du Musée, le non public, la colère des personnes confrontées à une définition de la culture dont elles ne perçoivent pas le sens.
Refuge d'une réflexion foisonnante et d'incessantes innovations en matière de médiation et d'accueil des visiteurs, les musées sont un objet parfait pour réfléchir plus largement sur la communication. Jouant avec l'ensemble des moyens offerts par la technologie, ils ouvrent sur un monde synesthésique, sensationnel, multidimensionnel, tout à la fois réel et virtuel et nous interrogent tout particulièrement sur la façon dont se réfractent et sont perçues les controverses sur les choix scientifiques et technologiques, sur les rapports entre la techno-science et la société.
Aujourd'hui, chaque internaute laisse des traces de son passage sur la toile. Repérage, surveillance, la circulation et l'utilisation des données numériques personnelles suscitent de véritables inquiétudes.
Posant le problème dans son ensemble, ce numéro d'Hermès engage une réflexion sur cette identité numérique nouvelle, qui réduit l'individu à une collection de traces.
Bousculant les lieux communs, les auteurs développent l'idée selon laquelle la traçabilité n'est pas seulement surveillance, dysfonctionnement, mais aussi une condition positive de la personnalisation de l'information, de l'interconnexion des personnes et des objets. C'est un nouvel espace public qui est ainsi créé par le numérique où les distinctions traditionnelles public/privé sont bouleversées.
Appelant à la création d'un habeas corpus numérique, Dominique Wolton et ses collaborateurs analysent les politiques publiques de protection et de normalisation, dans un contexte où règne avant tout le laisser-faire ou la régulation totalitaire.
Dans un rapport récent (2009), la British Academy met en garde les chercheurs britanniques aussi bien des sciences humaines et sociales que des autres sciences (physique, chimie, biologie, etc.) : ne maîtriser que l'anglais les condamne à être « mondialement connus. seulement en Angleterre ». Ce n'est pas la compétitivité de la recherche qui est seule en jeu : c'est également celle du pays entier. Et ce qui est vrai du Royaume-Uni vaut aussi pour les autres parties du monde.
Le tout-à-l'anglais, naguère présenté comme le nec plus ultra de la modernité, est désormais remis en cause par les anglophones eux-mêmes. C'est là un renversement de perspective spectaculaire, mais qui s'explique aisément à l'heure de la mondialisation. Le plurilinguisme et, par conséquent, la traduction - car on ne saurait apprendre toutes les langues - sont devenus des enjeux vitaux de la communication à l'échelle aussi bien planétaire que locale. La rationalisation est un appauvrissement.
Une telle évolution vient confirmer les analyses du volume précédent (H 49), qui mettait l'accent sur le fait que traduire n'est jamais une opération « neutre », « transparente » ou « à somme nulle » : c'est une recréation. Dans ce second volume, le projecteur est braqué sur la babélisation croissante du monde à laquelle on assiste aujourd'hui et sur ses enjeux, parallèlement au maintien de l'anglais comme langue dominante de la communication mondialisée.
La babélisation est cependant le contraire d'une solution : elle s'effectue en ordre dispersé et accentue l'ignorance de l'Autre. Pour qu'il y ait communication authentique, il faut une volonté politique de l'établir à travers la traduction. Ainsi s'explique la nécessité d'une approche pluridisciplinaire de la traduction. Seule celle-ci est capable de fournir les clés des recontextualisations culturelles et géopolitiques, indispensables pour comprendre la complexité du monde contemporain.
Michaël Oustinoff, Joanna Nowicki et Juremir Machado da Silva
Maastricht clôt quarante années de construction technocratique de l'Europe et ouvre une autre histoire : celle de l'Eurpe démocratique.
Avec le suffrage universel s'achève l'Europe des 50 000 et commence celle des 340 millions. Rupture considérable, d'autant plus angoissante qu'elle s'est produite sous nos yeux en direct, en symétrie à l'effondrement du communisme. L'Europe démocratique recquiert une fantastique révolution mentale, où les conditions sociales et culturelles sont plus importantes que les institutions. En un mot, l'Europe démocratique n'est pas la suite de l'Europe économique avec un zeste de suffrage universel en plus.
Elle est bien autre chose qui mêle l'Histoire, les valeurs et les idéologies. Tout est à respecter pour mobiliser les citoyens. Et d'abord retourner le gant de la logique technocratique. Il n'y a plus, d'un côté une élite moderniste qui sait à l'avance, et de l'autre des citoyens en retard, frileux, passéistes et nationalistes. Dorénavant, il y a égalité des points de vue et des légitimités. Pour réussir l'Europe des citoyens, il faut partir de leur réalité : la nation, l'identité, la mémoire.
Et casser cette tyrannie de la modernité. Le risque, si on refuse de penser les conséquences de Maastricht ? La naissance d'un puissant mouvement qui ferait de l'Europe le parfait bouc émissaire de toutes les difficultés à l'Est comme à l'Ouest. Réussir l'Europe démocratique, la dernière utopie, c'est d'abord accepter de raisonner autrement.