Alexis de Tocqueville fut à plus d'un titre un homme de son temps. Grand penseur, ennemi de tous les despotismes, il refusa de se contenter de la théorie, prenant une part active aux événements politiques troublés de son époque.
Dans cette biographie appelée à faire date, Olivier Zunz révèle comment ce jeune aristocrate français conçut, le premier, une théorie générale de la démocratie moderne. Son voyage aux États-Unis en 1831-1832, à l'âge de vingt-cinq ans, fut pour lui une révélation, la découverte d'une société où l'égalité est source de liberté. Le succès de son livre majeur De la démocratie en Amérique consolida son engagement. Député, ministre de la IIe République, il se mit au service de grandes causes : l'abolition de l'esclavage, la réhabilitation des criminels ou la liberté de l'enseignement avec l'espoir de réconcilier État et Église. Mais son nationalisme l'aveugla, jusqu'à soutenir la férocité du projet colonial en Algérie.
Refusant de soutenir le Second Empire, Tocqueville consacra ses dernières années à repenser l'histoire d'une Révolution française « entreprise pour la liberté » mais « aboutissant au despotisme », tragiquement. Une leçon pour comprendre le monde contemporain.
Les Français ont considéré avec surprise l´appel de Warren Buffet et de Bill Gates exhortant les plus grandes fortunes mondiales à suivre leurs exemples et à donner la plupart de leurs richesses à des oeuvres caritatives. Pourtant, ces derniers s´inscrivaient ainsi dans une tradition séculaire de la vie politique américaine : la philanthropie. Depuis le début du XXe siècle, dans le sillage d´un Rockefeller ou d´un Carnegie, la réussite outre-Atlantique s´accompagne d´un impératif philanthropique. Il ne s´agit pas seulement de « bonnes oeuvres », mais d´investissements destinés à mener des actions politiques d´envergure. Et si le but déclaré des généreux mécènes est toujours la recherche du bien commun, leurs motivations et l´affectation de leurs dons varient selon leurs valeurs et leurs engagements. Cet afflux d´argent est si important qu´il a largement façonné une partie de la politique culturelle, sociale et de la recherche des Etats-Unis, autant de champs d´action réservés en Europe à l´action étatique. Olivier Zunz raconte pour la première fois les liens uniques qui unissent l´argent privé et les affaires d´Etat, cette philanthropie exceptionnelle qui a fait l´histoire des Etats-Unis.
En quelques décennies, de la fin du XIXe siècle aux années 1950, les États-Unis sont devenus un empire économique, une super-puissance politique et un modèle culturel. C'est l'histoire de cet essor spectaculaire, couronné par l'expression fameuse de "siècle américain", que retrace l'essai d'Olivier Zunz.
Le secret de cette performance inégalée tient à un dialogue précoce, et inédit entre chercheurs des grandes universités, hommes d'affaires imaginatifs et administrateurs éclairés des grandes fondations. L'auteur reconstitue la chronique et interroge le bilan de cette féconde collaboration. Il mesure ce que lui doivent l'émergence d'un système de consommation de masse et l'invention de l'"Américain moyen", figure emblématique des Temps modernes. Il décrit aussi les espérances un peu naïves, et bientôt déçues, que faisait naître l'expansion de l'Amérique nouvelle : le rêve d'une société apaisée, débarrassée des conflits de classe par la quête du bien-être matériel et la poursuite continuelle du bonheur individuel.
L'Amérique est bien devenue la grande puissance qu'avaient imaginée les visionnaires du siècle dernier. Mais elle n'a su éviter ni les fractures ni les déchirements qui allaient bientôt démentir l'optimisme généreux des architectes de sa réussite. Le siècle américain est l'enfant tout à la fois de leur génie et de leur imprévoyance.
Professeur à l'université de Virginie, Olivier Zunz est l'auteur de Naissance de l'Amérique industrielle (1983) et de L'Amérique en col blanc (1991).