Ces textes manifestent une grande richesse d'imagination et d'expression ; pourtant le conteur a si peu fréquenté l'école, lors des pérégrinations incessantes de sa famille ! Issu de « buissonniers », comme il dit, de ceux qui préfèrent stationner discrètement dans de « petits pays », à l'écart des villages et près des cours d'eau, l'auteur n'a jamais oublié ses voyages.
En 1853 paraît à Turin, sous un titre novateur, l'autobiographie en français d'une institutrice née à Bonnieux, Vaucluse, qui s'installe en Italie après une jeunesse provençale évoquée avec passion dans ce premier tome.
Selon la Gazzetta Piemontese de l'époque, « les Confessions de Jean-Jacques ont désormais une suite avec les Confessions d'une femme, terrible procès qu'elle a eu le courage d'imprimer au sujet de son passé afin de conjurer l'injustice des préjugés et de dénoncer l'absence de droits dont souffre le sexe faible. » Versant féminin de mémoires célèbres, ce texte de Clémentine de Como, précédant de plusieurs années Histoire de ma vie de George Sand, reste d'actualité : elle y exige des législations plus adaptées, mais interpelle autant les mères et le système éducatif que les responsables politiques.
Elle décrit la réaction post-révolutionnaire jusqu'aux bouleversements historiques européens de 1848. Persuadée que le progrès des nations ne se dissocie pas du progrès de la condition féminine, elle fait écho, dans le camp des démocrates, aux luttes menées pour les libertés. Elle croit aux vertus de l'art qui émancipe l'esprit et sert la démocratie en développant les intelligences, et nous laisse des pages admirables sur toutes les formes de beauté qui l'aidèrent dans son combat. De surcroît, l'inlassable humour de sa narration éclaire les plus graves sujets. Elle ose l'impertinence cinglante envers toutes les tyrannies, participant de cette audace multiforme, individuelle et collective, qui anima nombre de femmes du XIXe siècle.
Victor Hugo la salue. Pourtant, l'oeuvre de Clémentine de Como, introuvable en France, a disparu ; on a oublié cette écriture puissante, à méditer.
Inaugurant une collection érotique, cet ouvrage d'un peintre-écrivain fait la « chronique extraordinaire d'un pénis ordinaire », avec tendresse, humour et poésie, une délicatesse qu'on n'attendait pas en un tel sujet. De la vie intra-utérine à la mort, les tribulations de cet appendice dit « viril ». Mais surtout « un hymne à la femme et au couple, une aventure, et peut-être même une surprenante initiation à l'art d'aimer » (Jacques SALOME).
Le tome II des « Romané Chavé par eux-mêmes » met en scène les hautes figures de sa tribu maternelle, autour du jeune Luka déjà personnage du roman Romano Atmo. Les situations souvent dramatiques y sont intensément vécues : rencontre de l'amour ou d'une bête sauvage, fuite à cheval, marche nocturne dans les forêts lettones où frémit encore l'écho des massacres nazis.
La symbolique du loup s'y renouvelle singulièrement. Réalisme et fantastique à l'oeuvre dans ces neuf récits donnent la vraie mesure des imaginations tsiganes. Ils nous confirment la spécificité culturelle d'un peuple toujours pourchassé et à l'étroit dans les stéréotypes dont on l'affuble depuis des siècles.
Edition bilingue romani-français avec commentaires, double lexique des deux tomes, annexes de documents inédits sur l'extermination des Roms de Lettonie pendant la seconde guerre mondiale.
Chronique d'un camp de concentration français, près de Saumur. Un aspect méconnu de l'histoire contemporaine des Tsiganes... et des autres. Camp géré par Vichy, camp parmi tant d'autres, plus d'une centaine, dont celui-ci est largement représentatif. Tour à tour poudrière, stalag, camp d'internement de nomades, de collaborateurs, de civils allemands... terrain de manoeuvres pour l'armée française, avant sa vente aux enchères. Nombreux témoignages.
Roman et pièce de théâtre groupés sous ce thème majeur sont illustrés d'aquarelles du peintre camarguais Folco Fuerga. Infirmière itinérante, militante des droits humains, elle place sous la bénédiction de Sara la Noire les souffrances des siens : « J'en appelle à la fraternité, et pourquoi pas, à la tendresse ». Déjà auteur d'essais, de poésie, de chroniques et de nouvelles saisissantes sur le monde de l'hôpital, elle nous livre ici deux autres aspects de sa philosophie existentielle.
Son premier roman, « Pour un bouquet de saladelle » se veut résolument roman de moeurs : Sonia vient en mai aux Saintes-Maries, à la recherche de ses origines. Elle y découvrira le monde des Gitans, auquel obscurément la rattachaient déjà une sensibilité, une humanité hors du commun. Et si c'étaient eux qui avaient raison ?
Avec un sens très vif du dialogue de théâtre, Esmeralda met aussi en scène ses personnages intérieurs. Malgré « Le Cordon de la Vie » qui les fait vibrer à l'unisson, tout sépare Eddy et Lolita, leurs mariages respectifs, leurs modes de vie, leurs cultures. Ils cheminent donc en amitié. Mais « nul n'échappe à son destin », vers lequel Dieu les conduit, inconsciemment guidés par ceux des leurs qui vont, prématurément, « passer l'arc-en-ciel ».
La nature, autour des marais de Camargue, participe au charme grave de ces deux histoires pour en rythmer les temps forts de joie et de douleur.
Les voici donc, les Boumions de Provence.
Ceux que l'on reconnaît parmi les santons de la crèche. Ils ont traversé les siècles et vont entrer dans le millénaire. Lick nous les présente, qui s'avancent hésitants sur le seuil de la modernité, ou plutôt les met en scène de son écriture cinématographique, dans la succession des grands plan-séquences de ses souvenirs. Cherchez la beauté et vous découvrirez les Tsiganes. A la source des parfums prestigieux des collines de Grasse, vous trouverez les mains bronzées des filles des Roms et des Sinté qui cueillaient ces milliers de fleurs odorantes entre les Alpes et l'Estérel.
Cette simple grâce d'être, pour son peuple, en harmonie avec le monde malgré son dénuement, l'auteur nous permet de l'entrevoir avec délicatesse, distinguant toujours le réalisme de la vulgarité et la pudeur de la pudibonderie. Mais un monde est en train de disparaître, celui d'une région encore rurale et agricole avec son fleuve encore sauvage à l'embouchure duquel se baignent des naïades. Le tourisme et l'urbanisation forcenée vont avoir raison de cette Provence éternelle que nous aimons.
Les Tsiganes ne peuvent rien à la folie des Gajé qui risque de les faire disparaître aussi. L'itinéraire bien rempli d'une vie d'homme et d'artiste aux multiples facettes est jalonné des interrogations de Sonakaï, de Giorgi et des anciens. Avec gravité mais sans désespérance, toutes les questions de la survie de l'identité romani sont posées... C'est pourquoi ce récit intéressera bien entendu les amoureux du patrimoine authentique de la Côte d'Azur.
Mais il devrait plus largement concerner tous ceux qui sont sincèrement attachés à l'histoire véridique du peuple tsigane et à sa réalité culturelle, loin des folklores de pacotille.