Gabriel Byrne a grandi dans une famille modeste des faubourgs de Dublin, où il est né en 1950, l'aîné de six enfants : son père était tonnelier chez Guinness, sa mère infirmière. Enfant introverti, il a tôt trouvé refuge dans l'imaginaire, au milieu des collines qui entouraient alors la maison familiale, ou dans les salles de cinéma où l'emmenait sa grand-mère. À onze ans, il répond à l'appel de la prêtrise, se voyant déjà missionnaire.
Mais il déchante vite, notamment quand il apprend que l'équipe de foot de Birmingham, ville la plus proche du séminaire où il va tout de même passer quatre années de sa jeune vie, a été reléguée en deuxième division? Renvoyé pour rébellion, il se retrouve, à quinze ans, dans sa ville natale, y collectionne les petits boulots, et les échecs : « Je me sentais un raté, comme plombier et comme prêtre », écrit-il. Sa passion pour le cinéma et le théâtre, où il passe l'essentiel de son temps libre, l'encourage à surmonter sa timidité et à s'engager dans une troupe d'amateurs, décision qui change sa vie.
Grâce au feuilleton Les Riordan, que le pays entier regardait toutes affaires cessantes sur l'unique chaîne de télévision, il devient vite une célébrité. Et John Boorman, qui l'a vu sur les planches à Dublin, lui propose bientôt un rôle dans Excalibur. Pourtant, son livre n'a rien de ces mémoires de star où s'enchaînent les anecdotes avantageuses.
Bien au contraire : construisant son récit de manière non linéaire, Gabriel Byrne revient sans cesse à l'enfant qu'il a été, à son attachement pour sa famille, à l'évocation des figures excentriques qu'il côtoyait dans son quartier, avouant qu'elles ont été les premières à lui donner l'amour de la scène. Et quand, dans le récit, surviennent les faits marquants de sa vie de comédien, c'est avec un humour discret mais constant qu'il les évoque :
Sa leçon d'équitation à Hyde Park, avec une Américaine jurant comme un charretier, qui se révélera être Ava Gardner ; sa cuite mémorable avec Richard Burton sur un balcon du palais Gritti à Venise, alors qu'il venait d'être défiguré lors d'un incident sur le tournage d'une série consacrée à Wagner. Il y jouait un petit rôle : « j'allais travailler avec quelques-unes des plus grandes stars du monde : Burton, Richardson, Olivier, Gielgud et Redgrave. Ou, du moins, j'allais pouvoir les regarder travailler. J'avais dix lignes à dire dans six pays différents. » Mal à l'aise avec la notoriété, au point de s'enfuir de Cannes, en 1995, au moment où tous les objectifs sont braqués sur lui lors de la projection d'Usual Suspects, Gabriel Byrne ne cache rien non plus, malgré une profonde pudeur, de ses dérives, de ses angoisses ni de son addiction à l'alcool.
Remarquable par la qualité de sa prose et la fluidité de sa construction, ce livre poignant, où l'autodérision le dispute à une véritable force poétique, est une magnifique confession sur l'ambivalence de la gloire, en même temps qu'un très bel hommage aux êtres et aux paysages familiers à qui l'on doit tout.
Un roman autobiographique situé dans la Bulgarie communiste des années 60 qui raconte la vie d'une jeune fille en vacances à la campagne chez ses grands-parents. Un texte inédit en France, d'une autrice germanophone reconnue, à découvrir dans Vintage.
Sans les sept kilos de camomille, pas de manuels scolaires, sans lignes copiées ni lectures imposées, pas de bonnes notes en langue, pas de paix pendant toute l'année scolaire à venir.
À travers les souvenirs d'une jeune fille en vacances à la campagne chez ses grands-parents, c'est toute l'histoire de la Bulgarie communiste des années 1960 qui nous est contée, tiraillée entre la peur de la guerre froide, la tyrannie du régime soviétique et l'attachement aux traditions.
Porté par une langue à la fois sobre et sensuelle, gorgé de poésie, d'odeurs de cuisine, de couleurs d'été, Sept kilos de camomille se lit en un souffle. Un texte d'une autrice germanophone reconnue, jusqu'ici inédit en France.
Je n'ai pas été un nazi. Ce que je veux te raconter ne concerne ni des atrocités, ni un génocide. Je n'ai pas vu les camps de la mort et je ne suis pas qualifié pour en dire un seul mot. J'ai lu le livre de Primo Levi sur ce sujet, comme tout le monde. Sauf qu'en le lisant, nous, les Allemands, nous sommes obligés de penser : Nous avons commis cela.
Longtemps, les questions posées par Callum à son grand-père allemand sur la guerre sont restées sans réponse. Et puis, un jour, Meissner s'est décidé à raconter.
Sa vie de soldat sur le front de l'Est, les débuts triomphants, l'esprit de corps, l'ivresse des batailles, et puis le froid, la faim, la misère. Et surtout l'année 1944 quand lui et ses camarades ont compris que la guerre était perdue ; que tout ce en quoi ils avaient cru, tout ce qui les faisait tenir, l'appartenance à une nation, l'espoir d'une guerre rapide, les rêves de retour, tout était en train de s'écrouler ; que dans la déroute, les hommes ne sont plus des hommes ; que le désespoir vous fait accomplir le pire et que rien, jamais, ne permettra d'expier la faute de tout un peuple.
Pascal ? « Il greffe sur l'augustinisme la doctrine de la raison d'État et parvient ainsi au paradoxe de la force pure et mauvaise à laquelle il faut docilement obéir. » La tragédie classique ? « C'est l'expression la plus parfaite de la déchristianisation ; elle crée un monde nouveau de la vie sublime, indépendant de toute pensée chrétienne. » Descartes ? « Il construit la sphère de la liberté humaine non pas en Dieu mais contre Dieu. » Molière ? Il met en scène l'« honnête homme » et son nouveau statut. Sécularisation, recherche d'une morale autonome, loin des préceptes de la religion : tel est le mouvement qu'Auerbach repère tout au long du XVIIe siècle français, à la fois du côté des productions intellectuelles et du côté des comportements sociaux. Il décrit les lieux de la vie artistique où se mêlent et s'affrontent, à Paris, les classes sociales ; il étudie les origines familiales des élites intellectuelles, analyse les mutations du parterre au théâtre et le glissement progressif de la bourgeoisie productive vers les conforts de la rente. Qu'il réfléchisse sur « la théorie politique de Pascal », sur « la cour et la ville », sur le « sourire hospitalier » de La Fontaine ou sur l'évolution sémantique du mot « passion », l'auteur de Mimésis déploie comme à l'accoutumée, dans ces essais, une érudition prodigieuse, en même temps qu'il révèle un XVIIe siècle tout tendu vers de nouvelles raisons d'être.
Allemagne, 1940 Max Koenig est un professeur d'université spécialisé dans l'Antiquité. Ou plutôt, était, car depuis quelques temps il est à l'hôpital où il tente de soigner la « neuropathie » dont il souffre. Rongé par le mal, à peine lucide parfois, il se lie néanmoins d'amitié avec d'autres patients, le mutique Carl qui l'aide à écrire des lettres, la douce Elfie qui entend des voix, et le petit Oscar. A l'hôpital, une routine presque joyeuse s'installe. Mais l'infirmière Rosemarie les met en garde. Car pour tous ces être fragiles, le Reich a un projet.
Max comprend qu'il est en danger, qu'ils sont tous en danger, et qu'il aurait dû écouter ses amis qui l'enjoignaient de quitter l'Allemagne. Alors que les bourreaux s'organisent et que son état de santé se détériore, Max va rassembler ses dernières forces pour sauver sa femme adorée, l'exubérante Felicitas, sa fille, Poupette et la belle et douce Elfie...
Stolp est un marginal, un sympathique bon à rien qui aime sa liberté avant tout. Ayant hérité d'un minus-cule appartement à Paris, il y pose ses bagages un peu malgré lui et, plutôt que de prendre possession des lieux, laisse Paris l'apprivoiser. A travers rues et cafés, il faut fuir l'atmosphère pesante de ce nouvel habitat, mais aussi les désespoirs latents d'un amour perdu. En chemin, il croise et recroise Carmen, esquisse avec elle les figures d'un duo éphémère. Car Stolp descend d'une lignée d'acrobates audacieux. Il veut jeter du lest. Ses pensées se délient, se libèrent, bondissent. Dans le nouveau roman de Paul Nizon, les intuitions les plus existentielles sont portées par une écriture aérienne : une voltige littéraire où l'humour entraîne le lecteur dans l'élan d'un récit qui mot à mot s'invente. Comme la vie.
En 1153, le géographe arabe Idrisi revient à Palerme, ayant mené bien des expéditions pour le compte du roi normand Roger II de Sicile.
Entre le souverain chrétien, esprit éclairé, et le savant musulman, une complicité s'est nouée au fil des années, malgré les pressions de leurs coreligionnaires et la rivalité amoureuse autour de la belle Mayya. Mais ces temps de paix s'achèvent... Querelles familiales, secrets d'alcôve, intrigues de harem, complots politiques : ce formidable roman d'aventures multiplie les rebondissements, en explorant la période charnière où la tolérance, à l'origine du rayonnement de la Sicile du XIIe siècle, cède la place à la violence.
Après son premier roman « troublant et plein d'éclats » (Le Monde), Les nuits froides de l'enfance, voici l'autre oeuvre majeure de l'écrivaine turque Tezer Özlü (1942-1986), composée peu avant sa mort en allemand, la langue de l'exil. Dans La Vie hors du temps, elle a les mêmes mots, simples, le même style, déstructuré, pour dire le chaos qui l'habite quand elle part à travers l'Europe sur les traces de Kafka, Svevo et Pavese, ses « frères d'âme » disparus. S'ensuit, cru, poignant, parfois joyeux, un road movie au bout de la littérature, qui l'affranchit, de la liberté, qu'elle recouvre, de la vie, qu'elle retrouve, de l'amour, qu'elle fait, même en passant, et qui la transporte.
Le culte de Lénine, dont lui-même abhorrait jusqu'aux formes les plus embryonnaires, a été un désastre pour sa pensée. Ses textes, qui n'avaient jamais été conçus comme un catéchisme, ont été momifiés, empêchant de comprendre ce qu'avait été sa formation politique. Celle-ci doit être replacée à la confluence de deux processus historiques. Lénine était un produit de l'histoire russe et du mouvement ouvrier européen, qui l'une et l'autre posaient des problématiques de classe et de parti, de force agissante et d'instrument. La synthèse opérée par Lénine a donc été déterminée par l'interpénétration de deux courants très différents, que l'on peut caractériser grosso modo comme l'anarchisme et le marxisme. Lénine a joué un rôle essentiel dans le triomphe du second.
Voilà pourquoi je m'attarderai longuement sur l'histoire et la préhistoire de ces deux courants, avant d'en venir à certains problèmes spécifiques auxquels Lénine et les bolcheviks ont eu à faire face. Sans cette plongée dans le passé, on saisit mal les dilemmes rencontrés par Lénine.
Tariq Ali, dès son introduction, pose les enjeux de son nouveau livre : s'il y brosse un portrait acéré de Lénine, et de son rôle capital dans l'avènement de la révolution d'octobre 1917, il se livre également à une passionnante analyse des conditions qui ont rendu possible cette révolution. Plongeant au plus près des préoccupations de l'homme d'État et du théoricien politique, dont il souligne la prescience - Lénine était très isolé dans son parti avant octobre 1917 -, ainsi que la rigueur et la limpidité des écrits, il jette un éclairage inédit sur sa vie, et particulièrement ses deux dernières années.
Avec Les Dilemmes de Lénine, Tariq Ali - lui-même intellectuel engagé et activiste politique - explore les questions auxquelles Lénine a été confronté, et qui restent d'une troublante actualité : le terrorisme est-il une stratégie ?
Est-il acceptable de soutenir les guerres impérialistes ? une action politique est-elle possible sans un appareil de parti ? quelle justification morale y a-t-il à s'emparer du pouvoir ? quelle influence les choix intimes - amoureux ou amicaux - de Lénine ont-ils eu sur son action ?
Au fil de ses interventions publiques, de ses articles, de ses essais politiques et de son oeuvre romanesque, Tariq Ali ne cesse d'en appeler à une alternative au libéralisme. Ce livre de non-fiction, par son ton très personnel, par l'ouverture de champ qu'il propose - c'est l'utopie révolutionnaire mondiale qu'interroge l'intellectuel d'origine pakistanaise - s'inscrit dans la cohérence de son oeuvre, et notamment de ses six romans publiés chez Sabine Wespieser éditeur.
Consacré à la décennie 1990-1999, le quatrième tome du journal de Paul Nizon témoigne de la profusion de ses sources et révèle la diversité de ses inspirations. S'il a atteint l'âge de la maturité et de la consécration, il n'en reste pas moins un créateur en perpétuel devenir, toujours à la recherche de la forme d'expression la plus juste. Paul Nizon est à présent un auteur reconnu, récompensé par de nombreux prix prestigieux et enfin honoré par la publication de ses oeuvres complètes en allemand en sept volumes. Ni l'âge ni la gloire n'interrompent pourtant sa quête artistique, son existence restant toute entière dédiée à l'art littéraire. De jour en jour s'impose à l'auteur le besoin de mettre des mots sur le monde pour mieux le comprendre ou tout simplement le faire sien. Mais Paul Nizon rend aussi compte de ses voyages, en Toscane, à Madrid, à Alger, en Allemagne, aux Etats-Unis, à l'occasion de lectures ou bien en compagnie de ses proches. Il aime être en partance. Sa double appartenance suisse et française est d'ailleurs évoquée dans ce tome. Pour la première fois, il livre les questionnements engendrés par son double héritage linguistique. Les notes prises au cours de ces dix années retracent la genèse de son roman Chien. Confession à midi. Un travail de longue haleine, commencé en 1992, abandonné pour un temps, puis repris en 1997 pour finalement paraître simultanément en Allemagne et en France en 1998. L'année 1994 sera jalonnée de longs séjours à Bergen-Enkheim, commune dont il a été élu Ecrivain d'honneur. C'est aussi l'année de la parution de L'oeil du coursier, texte qui tient une place importante dans son Journal. Aux souvenirs d'enfance, de jeunesse et de sa vie de famille d'autrefois se mêlent des méditations plus générales sur ses relations avec les femmes. En érudit passionné par toutes les formes d'art et par les artistes eux-mêmes, il dissémine au fil du Journal ses propres analyses de films (Fellini), ses réflexions sur la musique et bien sûr celles sur les lectures qui accompagnent le processus d'écriture. Dans ce volume, il revient aussi sur le rôle fondamental des journaux dans le processus créatif, les définissant comme l'«Autre face» de ses livres. Plutôt qu'une oeuvre achevée, Paul Nizon nous donne ici à voir un «déballage impitoyable», un portait de l'artiste au travail, en plein chantier. L'auteur lui-même présente son journal comme «des coups d'oeil dans l'atelier de l'écrivain», pour reprendre les termes de Wend Kässens, qui explique dans sa postface que «le titre Les Fiches du coursier renvoie aux milliers de pages de journal qui sont le fruit du travail créateur de Paul Nizon sur le texte littéraire, le précèdent, l'accompagnent et le complètent». Les textes publiés ici ne représentent qu'une partie de cette activité d'écriture, la plus passionnante pour le lecteur.
Ce jeune dandy cherchait à être quelqu'un, plus qu'à faire quelque chose.
Il comprenait que la vie elle-même est un art ayant ses propres styles, tout comme les arts qui cherchent à l'exprimer. Thomas Griffith Wainewright (1794-1847) fut une figure clé du Londres littéraire des années 1820. Ami de nombreux écrivains et poètes, il fut critique d'art, chroniqueur, collectionneur... mais il fut aussi escroc, faussaire et empoisonneur, et c'est à ce titre qu'il entra dans la postérité, sous la plume de Wilde.
Cet esprit brillant et pervers, personnage fin-de-siècle avant l'heure, connut une chute aussi brutale que son ascension fut rapide. Le destin de ce dandy assassin ne pouvait que fasciner Oscar Wilde, qui en dresse ici un portrait subtil et nuancé.
Ce premier volume du journal de Paul Nizon permet d'assister à la naissance d'un écrivain, puis à l'apparition des premiers doutes, dus au mauvais accueil reçu par Canto. Il faut dès lors parvenir à prendre le dessus, pour revenir à l'écriture. En 1961, Paul Nizon est un jeune homme d'une trentaine d'années. Son premier livre, un recueil de nouvelles, fait sensation, et la critique prend la mesure de son talent. Il se met alors à écrire Canto, belle oeuvre inspirée par son séjour à Rome. Une grande maison d'édition se propose de le publier. L'auteur, qui laisse derrière lui son métier et sa famille pour se consacrer exclusivement à l'écriture, croit voir se réaliser ses espoirs les plus fous.
Or le livre, publié en 1963, rencontre une incompréhension totale. Canto, fulgurante prouesse littéraire, se voit rejeté, ce qui plonge son auteur dans un état de crise. Au début de ce premier tome de ses journaux, il retrace la manière dont il parvient progressivement à reprendre le dessus et à revenir à l'écriture. La richesse des pensées, la précision et la passion avec lesquelles Nizon parle de la genèse d'oeuvres comme Immersion ou Dans la maison les histoires se défont, ses rencontres avec d'autres écrivains (Max Frisch par exemple), ses colères, ses brouilles et ses désespoirs, mais aussi son éternel combat pour pouvoir se consacrer exclusivement à son art... : tout ici concourt à une matière vivante exceptionnelle, un plaisir de lecture ininterrompu. Voici un journal d'artiste de grande qualité qui peut être lu par tout public mais sera bien sûr encore plus apprécié par les fidèles de Nizon.
Nous devons ce "concentré de journal" au travail d'un germaniste allemand qui a sélectionné environ dix pour cent des journaux de Nizon afin d'établir cette chronique "d'une montée en puissance d'un écrivain". Les journaux des décennies suivantes seront traités de la même façon. Ceux des années 1980 (comme L'Envers du manteau) bénéficieront d'une nouvelle édition revue et corrigée dans ce sens. Le but étant d'offrir aux lecteurs un condensé des réflexions, des émotions et de la vie de l'écrivain. Le résultat enchante.
Black Country est le récit de la rencontre improbable, au coeur d'une froide nuit d'hiver, de deux gueules cassées : Akram, fils d'immigrés pakistanais de retour d'Afghanistan, et Grace, prostituée accro à la drogue. Au bord du gouffre, en ce jour décisif où Akram s'apprête à commettre un attentat suicide et où Grace risque de perdre la garde de sa fille, chacun livre à l'autre le récit de son parcours chaotique. Il raconte son enfance au sein de la petite communauté pakistanaise, le racisme anti-musulman profondément ancré dans cette région déshéritée de l'Angleterre, son amitié avec d'autres exclus, sa douloureuse expérience de la guerre et son lamentable mariage arrangé. Elle évoque sa longue déchéance entre prostitution, alcool et drogues et son rêve de s'en sortir grâce à l'amour qu'elle porte à sa fille. Avec délicatesse, Nadim Safdar dresse le portrait de deux êtres en proie à la violence de la société, qui gardent l'espoir que les rebondissements du destin peuvent changer la vie
Depuis que le sultan du Caire et de Damas, Salahal-Din, a pris la décision de déloger les croisés de Jérusalem, l'érudit juif Ibn Yakoub rédige la geste de la reconquête. Dans le secret des palais, sous les tentes des campements ou dans la poussière des routes, il rend compte de l'intelligence stratégique, du courage et de la générosité de celui qui en 1187 entrera dans la Ville sainte.
Mais le souhait du mémorialiste est aussi de brosser le portrait du jeune Kurde devenu monarque : il recueille ses souvenirs, les confronte aux confidences de ses proches, et notamment du vieux serviteur Chadhi, dont la version du roman de formation du sultan, entre frasques et dépucelage, est nettement plus décapante. Au fil des années, Ibn Yakoub lève le voile sur le quotidien de la cour : les érudits paillards y lutinent les jeunes scribes tandis qu'au harem les favorites du sultan filent entre elles le parfait amour, la sultane Jamila suit la troupe habillée en homme, quand elle ne se consacre pas à l'écriture de traités subversifs...
Secrets licencieux, rivalités politiques, petites histoires mêlées à la grande histoire donnent chair à ces personnages dont le point de vue bouscule notre vision occidentale des événements qui ont marqué le Moyen Âge : et c'est bien le propos de Tariq Ali que de confronter, dans son Quintet de l'islam, la tradition arabe à la tradition chrétienne. Après Un sultan à Palerme, évocation de la Sicile cosmopolite du XIIe siècle (Sabine Wespieser éditeur, 2006), Le Livre de Saladin éclaire des enjeux qui restent très contemporains. Il a été traduit dans de nombreuses langues, y compris l'hébreu.
Avec une précision parfois clinique, presque cruelle, Musil exprime ici sa fascination pour la femme, le corps de la femme, et surtout la perception qu'elle-même peut en avoir, dans le vain écoulement de sa vie ou dans le brusque éveil de ses sens.
La «maison enchantée», ce n'est donc pas seulement la grande demeure vide où se consume Victoria, l'héroïne d'un de ces quatre récits (tous inédits en français). C'est la tour imprenable qu'est pour Musil le corps de l'autre, cet espace intime que l'on peut certes explorer, mais non voir avec les yeux de son habitante; investir, saturer, mais jamais véritablement posséder.
en 1889, oscar wilde publie dans une revue londonienne l'esquisse biographique d'un personnage peu commun : thomas griffiths wainewright ( 1794-1847 ).
esthète, collectionneur, critique d'art et chroniqueur, ce dernier, ami de nombreux écrivains et poètes, fut une figure clé du londres littéraire des années 1820. mais c'était aussi un escroc, un faussaire, et un assassin qui avait la manie d'empoisonner ses proches après leur avoir fait souscrire une assurance-vie à son profit. cet esprit brillant et pervers, ainsi que sa chute soudaine ne pouvaient que fasciner oscar wilde, qui, quelques années plus tard, allait connaître lui aussi la prison et l'abandon.
ce texte est suivi d'une réflexion poignante de hugo von hofmannsthal, auteur de la lettre de lord chandos, mais aussi librettiste de richard strauss, sur le thème de la gloire et la déchéance d'un dandy au destin de paria.
Tous ceux qui ont fréquenté l'atelier du peintre Ivor Woodall, au Cap, s'interrogent sur les causes de sa mort brutale, à quarante-deux ans. Notamment deux formidables figures féminines : Stella, obsédée par la chanson de Miriam Makeba - Love Tastes Like Strawberries - et Françoise, une jeune Rwandaise, qui avec sa soeur Doudou, tente de retrouver un équilibre.
le livre marquant de la période que couvre ce journal est stolz.
ce roman, qui fait "consciemment écho au lenz de büchner", lui a valu en 1975 le prix de littérature de brême.
dans le journal, nombre de pages témoignent de sa lutte pour se libérer de cette figure de stolz. il n'est pas étonnant que la fureur amoureuse de l'année 1977, sur laquelle s'étend le journal, ait été ressentie par nizon comme une régression et aussitôt mise en relation avec stolz. mais voilà longtemps que paul nizon n'est plus stolz.
c'est aux scènes de la vie conjugale d'ingmar bergman que lui font penser ses tiraillements entre les deux femmes, tiraillements que lui-même ressent comme une catastrophe existentielle. il affronte la crise avec un humour et une autodérision qu'on ne saurait méconnaître.
réflexions sur son travail passé, sur "la grande ville", sujet d'espoir et de désillusion : sur les américains et avant tout thomas wolfe, mais aussi tolstoï, rilke, kafka, joseph conrad et peler handke - lectures, analyses, prédilections.
rencontres avec d'autres auteurs jalonnent également ce volume, qui livre de nizon une tout autre image : l'écrivain dompte le chaos de ses expériences existentielles en se défaisant du passé, en se remémorant le présent, en le réinventant et en produisant, grâce à cela, littérature et vie.
ce second volume du journal de paul nizon, qui embrasse les années 1973 à 1979, montre un auteur de plus en plus maître de ses moyens, en passe de devenir cet écrivain consacré qui bientôt.
avec le roman l'année de l'amour, gagnera sa place dans la littérature européenne.
né à berne eu 1929, le plus grand écrivain contemporain suisse allemand, paul nizon. vit à paris. l'essentiel de son oeuvre est publié eu france par les éditions actes sud et jacqueline chambon. de multiples prix littéraires lui ont été décernés en suisse. en france et en allemagne.
La dite « Querelle des Anciens et des Modernes », une des controverses les plus médiatisées de la première modernité en Europe, a souvent été caricaturée comme opposant des réactionnaires épris d'Antiquité et de courageux pourfendeurs des autorités culturelles établies. Sous le choc de l'antique renverse cette vision en montrant comment les défenseurs de la littérature grecque classique, loin de se raccrocher à une tradition désuète, célèbrent en fait dans le monde antique une radicale altérité, peu compatible avec les normes de la bienséance et la culture de cour en vigueur sous l'absolutisme français. Ce qui choque et fait scandale dans les oeuvres d'une époque reculée se trouve ainsi retourné en modèle esthétique, venant à la fois nourrir les tensions et contradictions du « classicisme » et préparer la voie aux philosophies novatrices des Lumières.Contribution majeure à l'étude des débats littéraires et culturels de la première modernité, le livre de Larry F. Norman frappera également le lecteur non spécialiste par le caractère très contemporain de ses enjeux.
Par une froide nuit d'hiver, Akram, vétéran de l'armée britannique, sort de sa maison pour se rendre jusqu'à l'endroit où il doit commettre un attentat-suicide. Alors qu'il erre dans les rues, il tombe sur Angie, une prostituée accro à qui on a retiré la garde de son enfant. Akram se confie à elle et lui raconte son enfance au sein de la communauté pakistanaise qui doit faire face au racisme ordinaire, son amitié avec d'autres exclus (un gitan battu à mort parce qu'incapable de pleurer et le fils d'un skinhead), sa douloureuse expérience de la guerre en Afghanistan et son lamentable mariage arrangé. Il livre le récit de la vie d'un immigré tiraillé entre la loyauté à sa communauté ou celle à son pays de naissance, dont l'issue semble inéluctablement devoir déboucher sur un acte désespéré.
Thèmes traités :
- L'oint (la question des rapports entre roi et prophète).
- Abraham et l'annonce progressive de l'Alliance.
- Le Statut des femmes.
- Prophétie et apocalyptique.
- L'imitation de Dieu.
- L'élection d'Israël.