Nouvelle version de The Compatriots, The Brutal and Chaotic History of Russia's Exiles, Émigrés, and Agents abroad publié aux États-Unis en 2019, cet ouvrage - dont Jonathan Littell a eu l'idée de la traduction française - relate l'histoire de l'instrumentalisation par le pouvoir soviétique puis russe de la diaspora exilée, ou comment la Russie dès Lénine a utilisé les citoyens russes pour former une diaspora d'espions, de politiques, ou d'oligarques pour servir les intérêts de la mère-patrie, Russie d'hier et d'aujourd'hui en passant par l'ex-URSS. Cette nouvelle édition est largement enrichie de leur enquête sur les empoisonnements récents de Vladimir Kara-Murza et d'Alexeï Navalny et sur la récente vague d'immigration massive d'opposants depuis le début de la guerre en Ukraine - dont leur expérience personnelle et douloureuse fait partie.La guerre en Ukraine, l'effrayante répression de Poutine contre les leaders opposants, les dissidents politiques et les journalistes ont provoqué une nouvelle vague d'immigration, de la Géorgie à la Thaïlande, de la France aux Pays Baltes. Ces nouveaux émigrés ont pour traits communs un haut niveau d'éducation, un état d'esprit libéral et d'être originaire des grandes villes. Ils n'ont d'espoir de retour qu'à la condition d'un changement de régime.Ces nouveaux exilés ne veulent pas attendre les bras croisés que le changement advienne. Ils se sentent l'âme de la nation ; ils ont maintenu vivant leur lien avec le public russe en l'abreuvant tous les jours d'informations non-censurées grâce à la globalisation et à Internet. Parmi eux, les auteurs de ce livre. Émigrés eux-mêmes deux ans avant la guerre au début de laquelle ils furent inscrits sur la Wanted list des autorités russes pour leurs enquêtes, ils risquent aujourd'hui dix ans de prison s'ils reviennent en Russie.
De quelle Russie Poutine est-il le maître ? Pour unifier ce peuple pluriel conquis par les Vikings et les Mongols, sans frontières naturelles, aussi européen qu'asiatique, la Russie a fait de ces multiples influences son identité propre, quitte à en forger les légendes. Mais, en jouant de ce passé, elle s'est enfermée et contrainte dans ses rapports avec le monde extérieur. Telle est la thèse de Mark Galeotti qui, en relatant avec brio son histoire en quelques chapitres enlevés, nous donne les clés pour comprendre ce pays. Une réflexion passionnante et très accessible pour mieux comprendre la figure de Vladimir Poutine et la crise géopolitique actuelle.
Autocrate, le tsar tient son pouvoir de Dieu et ne saurait le partager. Il règne et il gouverne.
À travers les biographies contrastées des souverains et souveraines qui se sont succédé, Pierre Gonneau explique ce qui fait l'essence du personnage et sa fonction, du premier tsar, Ivan le Terrible, jusqu'à l'abdication du dernier, Nicolas II, en passant par des figures monumentales, comme Pierre le Grand ou Catherine II, mais aussi par les tsarévitchs assassinés et les imposteurs qui prétendent les réincarner. Il les fait revivre dans leur réalité humaine, dans leurs succès et leurs échecs, mais aussi dans la manière dont ils ont habité ce rôle unique.
C'est une façon nouvelle et enrichissante de raconter l'histoire de la Russie de l'Ancien Régime.
Le 15 septembre 1812, Napoléon entre dans Moscou. Dans la nuit, la ville s'embrase dans un océan de flammes. Après avoir longtemps espéré l'ouverture de négociations avec le tsar, la Grande Armée quitte la capitale ruinée le 19 octobre ; l'Empereur veut écraser l'armée russe et s'installer à Smolensk avant l'arrivée de l'hiver. Mais le froid et la neige sont en avance sur le calendrier. L'hiver russe surprend des troupes épuisées, sous-équipées, mal ravitaillées, embarrassées par leur butin, leurs blessés et leurs malades. La tragique retraite de Russie commence.
Michel Bernard raconte avec une rare maestria l'hallucinant voyage dans l'enfer blanc de la Grande Armée, en suivant l'itinéraire de onze hommes et une femme à travers la plaine enneigée, les collines verglacées, les forêts pétrifiées, au milieu des combats et du harcèlement des cosaques. Il raconte l'histoire de leur lutte quotidienne contre le froid extrême, le blizzard, la faim, la peur, le désespoir. Elle est comédienne ; ils sont officiers, sous-officiers ou soldats, diplomate (Caulaincourt), fonctionnaire et bientôt grand écrivain (Stendhal) ; ils se battent et avancent, passent monts et rivières, d'abord soutenus par le sens du devoir, puis par l'instinct de survie qui fait sauter cadres hiérarchiques, conventions sociales, et jusqu'aux repères moraux. Il n'y a plus d'armée, plus d'ami, mais le désir de s'en sortir, d'en finir avec une épreuve qui dépasse toutes les souffrances connues.
Napoléon est l'un de ces hommes. D'abord désorienté par l'évolution d'une campagne où rien ne s'est passé comme il l'escomptait, il s'efforce de sauver ce qui peut l'être quand s'annonce le désastre. Pour lui et son Empire, c'est le début de la fin ; pour les 20 000 survivants, vieillis, désabusés, l'âme marquée d'inguérissables blessures, « c'est encore la guerre et déjà, irrépressible, le temps du souvenir » (Michel Bernard).
Le pire est arrivé. La Russie est redevenue ce volcan impérial et nationaliste qu'elle fut à différentes reprises au cours de l'histoire. Russie : ce mot claque aujourd'hui comme une gifle cruelle. Mais nous faisons le pari que ce pays ne méritera jamais d'être réduit à une pareille caricature.
Il faut aimer la Russie pour décider de rééditer ce volume, l'un des classiques de L'âme des peuples... Nous l'avons fait parce que nous savons combien il est indispensable de surmonter les impressions, les clichés, les accusations dévastatrices, même lorsqu'elles sont fondées.
Ce petit livre n'est pas un guide. Il dit ce que le peuple russe est aujourd'hui. Parce que l'on ne comprend rien, du côté de Moscou et de la Volga, si l'on n'a pas le goût de l'âme russe chevillé au corps.
Un grand récit suivi d'entretiens avec Tamara Kondratieva (professeure à l'INALCO), Ludmila Oulitskaïa (écrivaine) et Fiodor Loukianov (sociologue et journaliste).
L'ironie du destin, pour les dirigeants de l'Empire russe puis soviétique, ce fut de lancer des politiques qui débouchèrent le plus souvent sur des résultats contraires. En huit dates clés, de la guerre de Crimée à l'effondrement de l'URSS, un essai pour comprendre ce qui motive notre plus puissant voisin depuis deux siècles. Une lecture très utile à l'heure de la "nouvelle guerre froide" et de l'alliance de la Russie avec la Chine ; et une question au programme des prépas ENS (Ulm et Lyon) 2022-2023.
La fin de la guerre froide (1989) et l'effondrement de l'URSS (1991) annonçaient une métamorphose de la relation extérieure de la Russie. Trente ans plus tard, l'invasion de l'Ukraine referme la page de l'histoire qui s'était alors ouverte. Vladimir Poutine a engagé son pays dans un conflit néo-impérial d'un autre âge - une tragédie pour l'Ukraine, un séisme pour l'Europe, un point de bascule pour son pays. Cette guerre dévastatrice, qui illustre l'obsession de puissance du géant russe, aggrave le paradoxe dans lequel celui-ci s'est enfermé. Acteur international de premier plan doté de multiples atouts, il se contente d'être un colosse aux pieds d'argile qui privilégie son pouvoir de nuisance.
L'analyse de son rapport au monde confirme que la Russie se trouve à la croisée des chemins. Que sera-t-elle demain : un État dynamique qui donne la priorité au développement interne ? Ou une puissance en déclin empêtrée dans ses vulnérabilités économiques, démographiques et politiques, aveuglée par la conviction qu'elle est vouée à être un Grand, mais incapable de se donner les moyens de l'être ?
Le présent ouvrage, qui passe en revue l'ensemble de ces problématiques, apparaît comme un puissant instantané des forces et des faiblesses de la Russie gorbatchévienne, eltsinienne et poutinienne, nourri aux meilleures et plus récentes sources internationales. Un livre passionnant et sans équivalent sur un sujet brûlant.
Qui était le véritable Raspoutine ?
Le tsarisme commence à s'écrouler. Les présages de la catastrophe s'accumulent : un autocrate velléitaire, une impératrice mystique et névrosée, un Parlement muselé, une société en mutation travaillée par des partis révolutionnaires.
Alors, des profondeurs du passé russe, vient Raspoutine. Homme de Dieu et diable sacré, dévot et lubrique, généreux et pervers, séduisant et repoussant, devin guérisseur et débauché impénitent, c'est, équivoque et contrasté, un personnage de Dostoïevski, immergé dans l'univers de Tolstoï. Son incroyable influence sur la tsarine Alexandra, son pouvoir inexpliqué sur la santé fragile de son fils, le tsarévitch Alexis, se développe au cours de la guerre, au point qu'il pèse sur les destinées de l'Empire. De toutes parts, enflé par la rumeur, un cri s'élève : « Il faut tuer Raspoutine ! » Autour du prince Ioussoupov, la conjuration s'organise.
Rejetant les faux bruits de complot et les légendes sur les « forces obscures », ce livre s'efforce de restituer à l'Histoire ce moujik insaisissable, ambigu et fascinant qui n'y apparut qu'à la faveur de circonstances exceptionnelles où, dans l'ultime convulsion de l'Empire, l'étrange fit irruption dans le politique et l'irrationnel occulta la réalité.
C'est l'allemand et non le russe qu'étudie Jules Legras à l'École normale supérieure. Mais ce germaniste, né en 1866, regarde plus loin à l'Est et dès 1892, il part découvrir la Russie et y apprendre sa langue pour devenir l'une des grandes fi gures des études françaises du monde slave.Sa rencontre avec la Russie a lieu loin des fastes des cercles aristocratiques si souvent décrits par les voyageurs français.Jules Legras se confronte à l'âme russe véritable, celle des moujiks, celle qui est victime de la famine, celle qui affronte les injustices. Dans ce journal imagé, l'auteur éclaire ces descriptions sans fard de cette société par une galerie de portraits d'intellectuels et d'écrivains (Tourgueniev, Tchekov, ou Tolstoï...) qui donne à son récit une formidable originalité.Au pays russe, devenu le classique incontournable des récits de voyage en pays slaves, est complété par un autre récit de Jules Legras, En Sibérie, alors front pionnier et terre inconnue suscitant toutes les convoitises.
L'univers du pouvoir russe, entre complots et tentatives de coup d'état.
La chronique de Moscou est emplie de grandeur et de sang, de complots, de folies et de mystères. Dans ce livre, Vladimir Fédorovski nous dévoile les coulisses du Kremlin, de la fin du stalinisme aux années Poutine. Sa longue familiarité avec les arcanes politiques lui a permis de recueillir des témoignages inédits et de se plonger dans des archives confidentielles. C'est ainsi qu'il nous conte aussi bien l'histoire de l'espionnage russe en Occident, avec ses épisodes parfois comiques, que les secrets du pouvoir suprême où certains accédaient à la gloire, tandis que d'autres finissaient en exil ou en prison.
Embrasser toute l'histoire russe dégage des lignes de force et des permanences structurelles, en dévoilant les réalités complexes d'un État-continent.
Plus de 90 cartes et infographies inédites présentent l'histoire de la Russie, mettant l'accent sur les différentes régions d'un territoire immense et sur les modalités de son contrôle par l'État.
- La Russie impériale, puissance en expansion depuis le XVe siècle, est fragilisée par une modernisation tardive et la guerre ; elle est mise à terre par la Révolution de février 1917.
- La Russie soviétique se forge dans une immense violence politique et sociale tout en donnant naissance à un monde nouveau, urbain et industriel.
- La période postsoviétique voit la Russie, après un temps de repli et d'incertitudes, tenter de renouer avec sa grandeur passée.
D'Ivan III, «grand-prince de Moscou et de toute la Russie» au XVe siècle, à Vladimir Poutine, président d'un pouvoir central de retour sur la scène internationale, le territoire de la Russie a ainsi connu de nombreuses évolutions.
Tout au long de l'histoire de la guerre, les chefs militaires ont cherché à tromper leurs adversaires pour vaincre. Jusqu'à l'époque moderne, la ruse reste relativement simple : elle est essentiellement le fait du « génie » du chef militaire. La révolution industrielle, l'augmentation de la taille des armées, l'accroissement de la mobilité, l'avènement de la troisième dimension ainsi que les premiers pas des technologies de l'information offrent la possibilité de synchroniser de multiples stratagèmes dans le temps et dans l'espace, sur des fronts entiers voire au niveau stratégique. Les opérations de déception - des combinaisons d'actions planifiées et coordonnées visant à tromper l'ennemi pour le faire agir dans la direction souhaitée - naissent alors véritablement. Ces opérations (Bertram, Error, Mincemeat...) deviennent même un « art majeur » lors du second conflit mondial, celles préparant le débarquement de Normandie étant probablement les plus complexes jamais mises en oeuvre. Leur usage perdure ensuite, même si elles sont plus ou moins mises en avant selon les belligérants et les périodes.
C'est une histoire de ces ruses de guerre, de 1914 à nos jours que raconte Rémy Hémez au plus près des sources. Une analyse tactique et stratégique rigoureuse qui met également en lumière l'imagination sans limite des combattants lorsqu'il s'agit de tromper leurs ennemis. L'auteur le démontre avec brio : alors que la technologie continue de progresser à un rythme vertigineux, les opérations de déception sont plus essentielles que jamais.
Octobre 1917 : dans le tumulte de la Grande Guerre, le coup d'État bolchevique apparaît comme un épisode parmi d'autres. Mars 1953 : la mort de Staline fait la Une des journaux du monde entier. Entre-temps, l'URSS est devenue la seconde puissance mondiale. Le modèle soviétique se pose en concurrent de la démocratie libérale. Il inquiète les uns et fascine des millions d'autres, qui ne connaissent de l'URSS que les images embellies filtrant de ce lointain pays. De la révolution d'Octobre à la mort de Staline en passant par la NEP, le pacte germano-soviétique et la constitution d'un bloc soviétique, Nicolas Werth retrace les premières décennies de l'URSS et pose le problème de la continuité et des ruptures entre la théorie léniniste et la pratique stalinienne.
« Ils ne sont pas si nombreux, ces témoins qui ont reçu la grâce de savoir exprimer d'eux-mêmes en faisant s'exprimer avant tout les autres » : ainsi François Maspero décrivait l'approche révolutionnaire de John Reed dans ses reportages publiés au début du siècle dernier.
Au cours des grandes journées d'octobre 1917, John Reed a parcouru en toute liberté la « capitale rouge », recueilli les analyses des principaux acteurs politiques, et écouté le peuple de Petrograd dans les cercles qui se formaient, dès l'aube, sur les places publiques, à la porte des boulangeries, à l'intérieur des casernes. De retour aux États-Unis, il rassembla dans l'urgence l'essentiel de ses observations et revécut cette « aventure » humaine dont il apparaît encore, aujourd'hui, comme l'un des témoins les plus proches.
«La Russie est un rébus enveloppé de mystère au sein d'une énigme. Mais il y a peut-être une clé : l'intérêt national de la Russie.» (W. Churchill)Plus de 100 cartes et infographies pour comprendre les problématiques actuelles et les enjeux pour la Russie.- Traditions, démographie, retards d'équipements : les faiblesses d'un géant.- Énergies, industrie spatiale, aéronautique, nucléaire, armée : la puissance russe retrouvée.- Basculement vers l'Asie et tensions avec l'Europe : la dérive géopolitique du continent.Crise ukrainienne, évolution des frontières, nouvel équilibre mondial : cet atlas met en perspective les intérêts géostratégiques de la Russie d'aujourd'hui.
Depuis la chute de l'URSS, les conflits n'ont pas cessé aux frontières de la Russie.
C'est le plus vaste État de la planète, fédéral et transcontinental. Son actualité, violente et complexe, ne cesse de nous interroger. En abordant conjointement les aspects historiques, politiques, internationaux, économiques et sociétaux de la Russie, cet essai accessible et vivant donne des clés de lecture pour aborder ce pays, non seulement à travers sa profondeur historique mais aussi à travers ses paradoxes contemporains. Ainsi, il nous permet de mieux saisir son positionnement actuel sur la scène internationale, les motivations de sa guerre contre l'Ukraine et la nature des relations franco-russes. Derrière la figure polémique de Vladimir Poutine se joue le destin d'une grande puissance en même temps que notre équilibre géopolitique mondial.
L'originalité de ce livre repose d'abord sur une conception globale de l'Histoire, ce qui signifie qu'outre la trame chronologique sans laquelle il n'y a pas d'histoire, le lecteur y trouvera une large ouverture sur les recherches conduites par les Russes à travers les siècles. La littérature russe depuis le Moyen Âge, la musique, l'art en particulier, l'architecture et la peinture, mais aussi, ce qui est plus rare, la danse, le théâtre, le cinéma - qui ont été des éléments clés de la Révolution de 1917 - y trouvent ainsi une juste place.
La seconde particularité de ce livre est de considérer la Russie comme la fille aînée de Constantinople. La Russie, en effet, fait son entrée dans le monde civilisé portée par l'Empire byzantin. Sans Byzance, la compréhension de la Russie contemporaine s'avère difficile, tant d'un point politique que culturel et religieux.
Enfin, il ne s'agit pas d'une histoire engagée mais, fidèle à la tradition incarnée par l'école des Annales, d'une recherche de la vérité historique de la manière la plus exhaustive possible. Une somme qui fera date par l'un des meilleures spécialistes.
La grande saga du « Zola yiddish ».
Dans la communauté juive de Saint-Pétersbourg, on ne parle que du mariage de Zakhari Mirkin, fils d'un riche industriel, avec la fille d'un grand avocat. Mais Zakhari ne se plaît pas dans son milieu d'origine. Il se rapproche des juifs malheureux, en butte à l'administration tsariste, dont il aime la foi vibrante, les espérances et le goût de la vie.
Schalom Asch est l'un des plus grands écrivains yiddish du XXe siècle. Son préfacier, Stefan Zweig, est encore celui qui en parle le mieux : « Nombreux sont ses romans qui portent la marque du génie, mais aucune de ses oeuvres ne possède l'élan, l'ampleur et la puissance de sa «trilogie russe» (Pétersbourg, Varsovie, Moscou). Ce sont surtout des destins juifs que Schalom Asch y peint, car c'est dans le coeur juif qu'il entend le mieux battre le coeur du monde ; mais comme ses personnages appartiennent aux milieux les plus divers, grands financiers d'avantguerre, étudiants, révolutionnaires, pauvres et riches, héros ou médiocres, ce livre représente une espèce d'univers qui reflète les innombrables événements russes dans ses facettes multiples. » Le premier tome de cette formidable fresque (1929-1931), primitivement intitulée Avant le déluge, donne notamment à voir la Révolution russe du point de vue juif.
Rédigés entre 1918 et 1921, de mémoire, dans un style alerte, les Carnets d'une révolution offrent un témoignage captivant sur l'ensemble des événements de 1917. Présent à Pétersbourg de février à octobre, Nikolaï Soukhanov, l'un des fondateurs du Soviet de la capitale, est un observateur privilégié de la vague révolutionnaire. Menchevik internationaliste, introduit auprès des nombreux partis socialistes, il rend compte de l'intérieur des diverses forces politiques en présence. Cet ouvrage n'est donc pas une simple chronique : Soukhanov, en militant, tâche de se situer au sein des événements, d'en dégager les possibles et d'évaluer d'un oeil critique les positions des différents protagonistes de la révolution.
La tumultueuse histoire de l'année 1917 à Saint Pétersbourg se poursuit : le premier tome s'arrêtait après le premier Congrès pan-russe des Soviets. Le second tome s'ouvre sur les journées de Juillet et nous emmène jusqu'au deuxième Congrès pan-russe des Soviets qui consacre l'insurrection bolchevique d'Octobre. Postface, glossaire des noms, journaux et organisations, ainsi que de nombreux index complètent cette fresque passionnante due à la mémoire très vive de Nikolaï Soukhanov.
Le Kremlin. Derrière ses murailles de brique rouge, combien la célèbre forteresse moscovite a-t-elle abrité de complots, de crimes et de trahisons ? Depuis la révolution de 1917, elle est le centre et le symbole de l'Empire soviétique fondé par Lénine et Trotski, conforté par Staline, géré par Khrouchtchev et Brejnev, mis à bas par Gorbatchev et restauré, tant bien que mal, par Poutine. Un siècle de grandeur, de terreur et de mensonges !
Combien d'énigmes, d'ombres, d'interrogations et de secrets reste-t-il derrière ses remparts ? Bernard Lecomte mène l'enquête avec brio et livre seize épisodes fracassants et emblématiques de ce monde de feu et de sang, où se côtoient le drame et le romanesque.
« Un panorama qui va de Raspoutine... à Poutine. » Le Temps.
Peu d'événements ont été étudiés d'aussi près que la Révolution russe, mais l'ouvrage d'Orlando Figes se distingue comme une contribution fondamentale. Dès sa parution, il s'impose du fait qu'il s'agit de la première histoire sociale, non idéologique et post-soviétique de ce cataclysme historique majeur.
De la grande famine de 1891 à la mort de Lénine en 1924, Figes détaille le long processus de mutation et de maturation d'une société au bord de l'effondrement. Surtout, il redonne sa place au grand absent : le peuple russe lui-même. Principal moteur des événements, principale victime aussi, le peuple trouve ici, enfin narrée et expliquée, l'histoire de sa tragédie.
La Russie sous l'Ancien régime (paru en 1974 aux Etats unis puis en Angleterre) est d'abord une formidable introduction à la civilisation russe, écrite de main de maître par un historien connu pour sa prose limpide et son sens du récit. Fondamentalement différente des pays européens, soumise à des contraintes géographiques fortes, la Russie était caractérisée par la permanence d'un système « patrimonial » : l'État, qu'il soit tsariste ou soviétique, était le propriétaire du pays et de ses habitants.
C'est ensuite un livre à thèse passionnant qui rappelle utilement, que le coup d'État bolchevique de 1917 et le régime totalitaire qui en est issu, n'ont jamais fait « table rase du passé », mais au contraire, ont bénéficié d'un terreau idéal - celui de l'autocratie tsariste que Pipes raconte et dissèque dans la lignée de L'Empire des tsars de Leroy-Beaulieu. Il semble que l'échec de la Russie à mettre en place un régime véritablement démocratique après la chute du communisme, si l'on compare son destin à celui d'autres pays d'Europe de l'Est, confirme la thèse de départ de Pipes : La Russie n'est pas condamnée à vivre éternellement sous un régime despotique ou semi-despotique, mais son héritage historique rend la rupture définitive d'avec ce dernier particulièrement difficile.
Alors que la Russie de « Poutine II » s'enfonce aujourd'hui dans une nouvelle dictature, tous ceux qui s'intéressent à ce pays doivent lire cet ouvrage essentiel.
Cette anthologie a pour ambition de mettre en résonance deux types de sources : les témoignages de ceux qui sont passés par le plus grand et le plus durable système concentrationnaire du XXe siècle, et les archives produites au quotidien par la bureaucratie qu'a été le Goulag, Direction Principale des Camps. Ou pour le dire autrement, confronter deux visions - celle du détenu et celle de l'administration concentrationnaire.
La littérature :
Les textes des témoins représentent un des éléments essentiels permettant de comprendre le phénomène concentrationnaire soviétique. C'est en grande partie grâce à la traduction d'oeuvres littéraires, et tout spécialement d'Une journée d'Ivan Denissovitch puis, une dizaine d'années plus tard, de L'Archipel du Goulag d'Alexandre Soljenitsyne, que cet univers acquiert une visibilité dans l'espace occidental. Cette littérature de témoignage constitue une trace essentielle des violences aux côtés des lieux, des documents d'archives et d'autres formes de postérité du Goulag (sociales, économiques, etc.). Elle est habitée par un souci mémoriel et/ou commémoratif : construire une trace de l'événement, créer un monument pour les morts. Cette dimension sera notamment explorée à partir des images du corps qui abondent dans les écrits sur les camps : corps souffrant, corps amputé, corps dégradé ; corps individuel, corps collectif. La littérature du Goulag constitue un corpus stratifié qui reflète les différentes étapes des répressions et donc l'évolution de l'institution concentrationnaire elle-même : ainsi les témoignages émergeant au moment de la Perestroïka diffèrent-ils de ceux écrits pendant les années du Dégel, lesquels sont très différents de ceux de l'immédiat après-guerre. Cette littérature documente non seulement la réalité des camps mais aussi la façon dont les identités individuelles et collectives ont pu être façonnées par la violence extrême. Les répressions staliniennes n'ayant fait l'objet d'aucune condamnation dans l'espace judiciaire, et en l'absence de témoignages produits à la barre, les textes littéraires ont constitué pendant une longue période la preuve principale de l'événement et ont porté l'entière responsabilité de cette attestation. En recourant à différentes formes de narration, les écrits des témoins contribuent bel et bien à rendre cette expérience de la violence extrême intelligible, lui donnent valeur de contenu culturel et en font un objet de pensée universel.
Les archives :
Depuis le milieu des années 1990, l'exploitation des archives du Goulag a considérablement enrichi notre connaissance du système concentrationnaire soviétique. Au terme de dix ans de travail mené par une équipe d'une quinzaine d'historiens, dont Nicolas Werth, est parue à Moscou la monumentale Istoria Stalinskogo Gulaga en 7 volumes, qui constitue à ce jour la publication de documents d'archives la plus complète sur cet univers concentrationnaire. Cette somme analyse le système du Goulag dans son ensemble et sous ses différents aspects, à la fois comme un lieu de répression politique et de « refonte » des détenus, comme un système économique de travail forcé, comme une immense administration constituant un véritable « État dans l'État », comme une société avec ses codes, sa sociabilité, ses conflits internes, sa vie quotidienne. Certes, l'immense « littérature bureaucratique » (en 1950, l'appareil central du Goulag reçut pas moins de 133 000 rapports écrits rendant compte de « la situation sur place ») est de qualité très inégale, entre « rapports de parade » adressés régulièrement par les plus hautes autorités du Goulag au ministre de l'Intérieur et documents internes échangés aux échelons plus modestes de l'appareil bureaucratique, généralement beaucoup plus informatifs et directs. Ces textes apportent un regard radicalement différent - et très instructif - sur le système concentrationnaire vu par ceux qui étaient en charge de son fonctionnement quotidien. Ils permettent, pour la première fois, de confronter le vécu du détenu, tel que nous le rapportent les témoignages, et celui du gardien, du chef de camp, du responsable de l'une des innombrables sections et directions culturelles, éducatives, économiques, administratives de cette immense machine bureaucratique qu'était la Direction principale des camps.