L'Éloge de la folie est l'un des textes les plus célèbres d'Érasme et fut un bestseller européen dès sa parution en 1511. Le savant de Rotterdam y met en scène la déesse Folie s'adressant facétieusement aux hommes pour leur montrer qu'elle gouverne le monde. "Véritable dispensatrice de bonheur", fille d'Ivresse et d'Ignorance, Folie préside à toutes les circonstances de l'existene humaine: elle rend possible le mariage, la maternité, gouverne tous les métiers, soumet les rois et les prélats à son empire.
Savoureux, comique mais aussi polémique, cet opuscule est un brillant exemple de la réinvention des formes antiques à la Renaissance.
Parangon de l'éloge paradoxal et du jeu sérieux qu'affectionnaient les humanistes, cette courte déclamation parodique joua le rôle de détonateur du vaste mouvement de la Réforme protestante.
L'Art de la guerre, publié en 1521, occupe une place singulière dans l'oeuvre de Machiavel. Présenté sous la forme d'un dialogue, l'ouvrage surprend par son esprit peu machiavélique. Les considérations tactiques y côtoient des propos consacrés aux nécessités matérielles de la guerre (recrutement, armement...), orchestrant avec subtilité une réflexion sur le pouvoir.Quelles provisions valent le plus : les vivres ou les armes ? Quelles limites la politique impose-t-elle à l'art de la guerre ? Comment définir l'autorité ? Ce sont là quelques-unes des questions soulevées par Machiavel qui puise ses modèles chez les Anciens. En grand stratège, il omet parfois d'y répondre. Mais la guerre est une affaire si sérieuse qu'il faut peut-être savoir la manier avec ironie.
Le hasard des sollicitations a voulu que ces lettres imaginaires s'ordonnent heureusement d'elles-mêmes. On peut donc les lire à la suite, comme composant un portrait, par petites touches, du philosophe, penseur, écrivain, polémiste, physicien, mathématicien et quasi-théologien peut-être un peu mystique.
Un portrait inattendu, revivifiant, qui engage ainsi tout naturellement à relire ou à découvrir les oeuvres de Pascal, dans une approche fondamentalement plurielle et dialogique.
AUTEURS : Christian BELIN, Hall BJORNSTAD, Laurent BOVE, Gérard BRAS, Alain CANTILLON, Jean-Pierre CLÉRO, André COMTE-SPONVILLE, João F. N. B. CORTESE, Pierre Antoine FABRE, Agnès GUIDERDONI, Sophie HOUDARD, Vincent JULLIEN, Étienne KLEIN, Thierry MARCHAISSE, Sébastien MARONNE, Éric MÉCHOULAN, Michael MORIARTY, Yasushi NORO, Hélène OSTROWIECKI BAH, Sabine PROKHORIS, Sylvie ROBIC, Léo STAMBUL Alain CANTILLON est spécialiste de Pascal, fondateur et coordinateur du Centre d'études interdisciplinaires sur Pascal, Port-Royal, et l'Europe moderne, Université Sorbonne Nouvelle. Son édition des Pensées (Marchaisse, oct. 2023) propose une véritable révolution philologique.
Au XVIe siècle, l'immense empire inca établi sur les Andes s'effondre sous les coups de l'envahisseur espagnol. Avec la fin de l'hégémonie inca, c'est toute une culture du « bon gouvernement » qui est réduite au silence - silence que Garcilaso tentera d'annuler dans les Commentaires royaux sur le Pérou des Incas. Il y décrit un ensemble de lois et de principes limitant la propriété et favorisant la redistribution des richesses en vue de subvenir aux besoins de chacun - structure socio-politique que d'aucuns considéreront comme un « communisme primitif ». Les écrits de Garcilaso ont eu beaucoup d'influence sur les réformateurs sociaux et révolutionnaires des siècles suivants. Ce livre en propose une synthèse.
Montaigne était-il un humaniste? Un moraliste? L'image aux contours incertains de l'honnête homme ou du lettré lui convient-elle? Lire Montaigne exige d'aller bien au-delà d'idées toutes faites sur ce qu'il nous enseignerait, l'ample respiration et les mouvements impétueux de sa pensée livrant plus que des leçons, leçons de choses ou leçons de vie. Alors il faut parier - parier qu'une autre lecture en est possible, dont les audaces engagent dans l'interprétation risquée d'un cheminement tout uniment de vie et de discours. Les Essais expriment l'assentiment de l'esprit à la profondeur du présent et des rencontres qu'on y fait des choses et des autres. L'enjeu n'en est pas une certitude exposée à tous, c'est la découverte d'un équilibre où se tenir soi-même, d'où apprendre et d'où agir.
Quatre-vingts escales au pays de Montaigne, qu'Alain Legros a passionnément et patiemment exploré durant trente années de compagnonnage avec l'auteur des Essais. Bien que né voilà près de cinq siècles, Montaigne nous parle encore, il nous fait du bien, nous aimons sa compagnie.
Le voyage auquel invite le titre enjoué de ce livre, chaque lecteur ou lectrice le construira à sa guise, en sautant d'un lieu à l'autre au gré de ses caprices, de ses curiosités.
On ne fait pas le tour de Montaigne. Tout au plus peut-on, comme ici, dans des textes courts, donc lisibles d'une traite - à raison d'un par jour ? comme on lit un article de journal, une fiche de cuisine, une notice de catalogue... -, exposer à un large public les considérations fragmentaires et les découvertes originales d'un chercheur soucieux d'exactitude et de vérité, qui s'est rêvé aussi auteur, en quête de partenaire avec qui jouer à la paume sur le terrain des mots : « La parole, dit Montaigne, est moitié à celui qui parle, moitié à celui qui l'écoute. » La balle est maintenant dans votre camp.
Le présent volume développe une leçon, tenue en 1986 dans le grand amphithéâtre de l'université de Ferrare. Eugenio Garin s'y penche sur la circulation exceptionnelle, aux XVe et XVIe siècles, des écrits hermétiques. En peu de pages, il fait apparaître comment théologie et magie hermétique tressent ensemble un nouveau mode de pensée qui sera au fondement de la Renaissance.
Sans doute jamais Montaigne n'a connu un tel engouement public.
Il paraît régulièrement différentes versions des Essais et des livres savants sur sa vie ou sa pensée. Ses citations émaillent les dissertations scolaires ou les discours officiels, son nom est choisi pour des rues ou des confréries de toutes sortes... Bref, la figure de l'écrivain périgourdin jouit aujourd'hui d'un prestige unanime.
Mais qui s'est véritablement risqué à lire l'impressionnant pavé des Essais ? Malgré les recommandations d'un Flaubert, Nietzsche, Tolstoï ou d'un Stefan Zweig, l'oeuvre à l'érudition foisonnante effraie parfois un peu. Le XVIe siècle paraît loin de nos vies... et pourtant !
Nous avons alors choisi environ cent cinquante citations, en français moderne, pour donner un aperçu de son incroyable liberté de pensée et de tempérament. Par petites touches thématiques, se dessine ainsi le portrait d'une « conscience heureuse » (Marcel Conche). On trouvera là une manière puissante de déchiffrer notre temps chaotique, un bréviaire pour mieux se comprendre et, peutêtre, pour apprendre à (mieux) vivre. Vingt-six grandes personnalités - écrivains, poètes, artistes, universitaires, hommes et femmes engagés dans la politique, la justice ou la médecine - ont accepté le pari de se raconter un peu, au miroir de Montaigne. Le dessinateur Daniel Maja accompagne à sa manière cette introspection sage et joyeuse.
Par-delà les siècles, Montaigne devient notre ami véritable. Tout en nous invitant à « vivre à propos », il s'affirme comme un contemporain séduisant et lucide. ?
"La principale charge que nous ayons, c'est à chacun sa conduite ". De quelle marge de manoeuvre disposons-nous, par rapport à ce que nous avons appris ? De quel recul disposons-nous par rapport aux coutumes et aux opinions en vigueur autour de nous ? Et de quelle autorité dispose le jugement pour en faire la critique ? Sur ces questions, Montaigne s'essaie, se met à l'épreuve, s'interroge. " Que sais-je ? " Si la philosophie que nous découvrons dans les Essais peut se lire comme l'émergence d'une pensée à la première personne, une lecture attentive nous oblige à y voir une situation plus inquiète que jubilatoire.
La pensée qui s'y donne à voir, c'est paradoxalement une pensée qui " ne marche qu'à tâtons, chancelant, bronchant et chopant ". Marc Foglia, professeur agrégé et docteur en philosophie, enseigne la philosophie dans l'Académie de Besançon. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages sur Montaigne et d'un manuel de philosophie pour les classes de Terminale.
Dans ce livre publié pour la première fois en 1964, Eugenio Garin réussit un tour de force jusque-là sans égal : présenter de façon concise et toujours claire l'essentiel de l'humanisme italien, des origines jusqu'à l'oeuvre de Giordano Bruno. Ce grand classique de l'histoire de la pensée retrace le passage du Moyen Âge à ce mouvement appelé « Renaissance », en souligne les innovations, tant sur le plan des institutions que sur celui des coutumes, et fait revivre les débats philosophiques qui, à cette époque, secouent les hommes de science, les artistes, les théologiens ou les hommes politiques.
Après deux maîtres spirituels (Eckhart, Thérèse d'Avila), deux philosophes (Sénèque, Lulle) et trois écrivains (Shakespeare, Dickinson et Novalis), ce 8e ouvrage de la collection « Ainsi parlait » est consacré à un des grands humanistes de la Renaissance, esprit plus universel encore s'il se peut que ses deux aînés Érasme (1467-1536) et Thomas More (1478-1535). Paracelse, qui soigna Érasme à Bâle en 1526, était médecin, naturaliste, philosophe et théologien.
Ses oeuvres complètes comptent 26 volumes. Révolté contre le conformisme des savants de son temps, il déchaine leur colère par la hardiesse de sa parole et la puissance visionnaire de sa philosophie de la nature : « Plus je vais plus je trouve que ce n'est pas seulement en médecine, mais aussi en astronomie et en philosophie que rien n'a été fondé sur de vrais principes. » Et il ne craint pas d'ajouter : « Après ma mort je serai là, plus encore qu'avant, pour vous juger. Et si vous dévorez mon corps, vous n'aurez dévoré que de la boue. Paracelse sera là, même sans corps, pour vous livrer bataille. » Étonnamment proche de la philosophie de présocratiques comme Anaximandre et Héraclite, mais aussi de le pensée taoïste Paracelse est attentif avant tout aux correspondances qui entre l'homme et son environnement :
« L'homme, écrit-il, figure un pépin et le monde la pomme ; et comme nous pensons les pépins au sein de la pomme, il convient de penser l'homme dans le monde qui l'entoure. » Éminent spécialiste de Paracelse, Lucien Braun rend enfin accessible à tous cette pensée reste dérangeante et féconde.
Rabelais ne parle pas que des mots, il désigne des choses. Il se noue une intrigue au coeur de l'oeuvre de Rabelais qui pourrait retenir l'attention des philosophes, pour peu qu'ils se souviennent de la vie des choses, au risque de leur obscénité. L'encyclopédie rabelaisienne n'est pas seulement un monde de signes empilés pour le seul plaisir de la dissémination. Le moine indigne et le voyageur masqué, le médecin au grand coeur et le savant sévère n'ont pas encore livré tous leurs secrets, malgré des siècles de commentaire. Il était naturel que quelques Pantagruélistes se donnent un temps de réflexion autour de la « fine follie » revendiquée par le pronostiqueur de toutes les Renaissances de l'esprit. Quel étonnement alors si le fameux bateleur devient notre Présocratique, notre Architecte, notre Réformateur?
L'humanisme est un mot-choc et surdéterminé qui appelle la définition d'un champ.
C'est la Renaissance, ce temps de bouleversements et de crises, qui va donner tout son relief à la notion de dignitas hominis. Celle-ci se cristallise autour d'une liberté créatrice qui est tout d'abord libération de la pensée. Pic de la Mirandole, en des accents singulièrement modernes, l'exaltera à l'extrême. Retour de la philosophie aux Anciens, par-delà le déclin de la scolastique, ivresse de l'esprit qui, parcourant librement l'histoire de la pensée, croit reconnaître partout des "éclairs de vérité".
L'esprit devient alors comme un pôle d'attraction pour la métaphysique. Agent de correspondances et d'unité, hors toute frontière factice, il se mire dans cette nature qui lui fait signe comme son double. Dans ce contexte, il n'est de philosophème mieux que la métamorphose qui puisse rendre la voix de l'homme de la Renaissance, partagé et paradoxal, à la croisée d'un monde qui finit et d'un autre qui commence.
Exaspéré par le sentiment de ses limites, il sait qu'il doit parcourir l'être dans sa diversité et épouser toutes les formes de pensée et de vie pour s'arracher à sa finitude. C'est à ce prix seul qu'il s'invente visage d'homme. Au miroir duquel se reflète celui de Dieu. On comprendra alors les métamorphoses du divin comme ce lieu de feu où les extrêmes se rencontrent.
Le temps, pour Descartes, n'est pas discontinu. Voilà la thèse de ce classique des études cartésiennes, qui propose une idée de Descartes entièrement nouvelle.La Philosophie première de Descartes permet en effet une nouvelle lecture des doctrines cartésiennes les plus énigmatiques : la libre création des vérités éternelles, le lien entre intuition et déduction, la place du pouvoir de choisir dans la définition de la liberté.L'ouvrage pose aussi, de façon originale, la question présente de la possibilité d'une métaphysique, comme rapport du temps à l'éternité ou de notre pensée à la vérité.
Faire découvrir en Montaigne un penseur de la vie en société, de ses contraintes et de ses libertés : telle est l'ambition, originale et audacieuse, de l'ouvrage de Philippe Desan.
Les Essais ne se résument pas à un récit de soi, d'où l'appartenance sociale aurait été totalement effacée. Le moi de Montaigne est un moi en société. Et le but des Essais est de penser le rapport entre l'existence singulière et le social, l'individuel et le collectif.
C'est donc à la sociologie bien plus qu'à la psychologie qu'il nous faut avoir recours pour comprendre l'oeuvre de Montaigne. Les grands thèmes de sa pensée, scepticisme et curiosité, relativisme culturel et civilité, se trouvent dès lors éclairés d'un jour nouveau, qui leur confère toute leur portée sociale et historique.
On découvre un Montaigne inattendu, loin de l'image du sage réfugié en sa bibliothèque, coupé du monde et de la vie en société. C'est à une leçon inédite de sociologie que l'on assiste alors, capable d'articuler ensemble individu et société, dans un monde de conflits et de violences où l'idéal d'honnêteté toutefois n'est pas totalement oublié
Descartes n'invente pas le primat du sujet humain - déjà affirmée dans «l'humain mesure de toutes choses» de Protagoras ; il n'est pas non plus le premier à mettre au premier rang la rationalité - l'ontologie mathématique de Pythagore le précède en cela. Son originalité est de les poser ensemble. L'objet de ce livre est de comprendre comment Descartes s'y est pris pour tenter d'accorder ces deux positions théoriques adverses, et pour quelles raisons. Nous ferons alors ce constat : Descartes est moins le fondateur du rationalisme que celui qui fait entrer le rationalisme dans une crise profonde, caractéristique de la pensée moderne.
Toutes les clefs pour comprendre l'auteur et son oeuvredans son ensemble.
L'analyse des notions.
Des liens avec d'autres oeuvres.
Un texte et son commentaire : letexte intégral du chapitre I, 31, «Des Cannibales «.
Des outils: lexique, sujets de dissertation, bibliographie.
C'est à Louvain, en 1516, qu'Érasme fit publier l'Utopie, ce petit livre pétillant de malice, d'intelligence et d'esprit critique de son ami Thomas More. Un demi-millénaire plus tard, il s'agit plus que jamais de mettre l'utopie à l'honneur.
Toutes les langues du monde, en effet, doivent un nom commun à Thomas More: utopie. Ce volume rassemble quelques-uns des passages les plus forts du livre de 1516, dans une nouvelle traduction du latin, éclairés et actualisés par des commentaires émanant de membres de la communauté univer- sitaire, de tous horizons et de toutes les disciplines, étudiants, professeurs, chercheurs, alumni... La peine de mort, l'exode rural, la propriété privée, l'éducation citoyenne, la tentation totalitaire, l'esprit des lois, le dialogue interreligieux, l'urbanisme, l'égalité sont quelques-uns des thèmes abordés par More, il y a cinq cents ans, et qui ne cessent de passionner les chercheurs dans la société d'aujourd'hui... et de demain.