« Nous avions entendu dire que Monsieur Jules écrivait, qu'il avait publié des livres et qu'il était renommé pour cela. Mais cela restait un peu mystérieux pour nous : les marins-pêcheurs avaient très peu l'occasion d'avoir un livre entre les mains et beaucoup d'entre eux ne savaient pas lire. (...) Quant aux sujets de ses livres, il disait qu'il écrivait de belles histoires d'aventures imaginaires. Celle qu'il rédigeait actuellement m'intriguait, car elle semblait se passer en mer. En discutant un peu avec lui, il m'indiqua que cela concernait un engin pouvant aller sous l'eau ».
Dans ce savoureux ouvrage, Olivier Jochem mêle réalité et fiction avec une grande dextérité. Il donne la parole à Alexandre Dulong, un capitaine au long cours engagé par Jules Verne pour naviguer avec lui sur le Saint-Michel. Le marin-pêcheur fait l'étonnant récit de ses trois années passées en compagnie de l'écrivain en baie de Somme. L'attrait de celui-ci pour l'élément marin l'attire au port du Crotoy, où il acquiert une maison pour y travailler au calme. Cette belle amitié livre une facette méconnue du romancier d'aventures, en apprenti navigateur sympathique et passionné. Bien qu'en partie fictive, la tranche de vie ici contée apporte un éclairage nouveau sur la genèse de certaines des ?uvres du génie littéraire, dont "Vingt mille lieues sous les mers".
Ça se passe là où souffle le vent d'autan... Là où la langue occitane fredonne, roule et claque. En pays ardent, gorgé de soleil où hommes et femmes fêtent Carnaval, où le temps s'égraine entre semailles et moissons... mais voilà le tocsin qui, cet été 1914, sonne la fin des battages et appelle les hommes au front. C'est alors toute la collectivité qui est prise dans la tourmente de ces «?années rouges?». Une communauté languedocienne que l'auteur célèbre avec un amour patent, dans cette superbe fresque du centenaire, à la fois réaliste, émouvante et drôle, qui découvre le sublime sous le commun.
« J'ai tenu au cours de ma vie à rassembler un certain nombre de faits que j'ai vécu. Ce recueil que j'aimerais voir lire, illustre une période de 50 ans environ et à pour titre «Militant de base pendant la guerre froide». J'ai écrit pour expliquer que la plus petite conquête sociale a été arrachée par des militants malmenés, parfois par ceux-là même qu'ils entraînaient. »
Au tout début du XXe siècle, à l'époque de Chopin, Picasso et Edison, un jeune couple fraîchement marié fait ses valises pour Gorée, au Sénégal. Richard, en qualité de trésorier de la colonie française, y a été muté pour une mission d'au moins trois ans. Son épouse, Marthe, se réjouit et s'inquiète de ce long voyage, des gens qu'elle rencontrera là-bas, de l'effet qu'elle et son mari produiront sur la colonie et sa société. Ce sera certainement une aventure enrichissante pour la jeune femme du monde qu'elle est. En tout cas, cela promet de lui faire changer ses habitudes... Un roman écrit avec le panache d'une femme émancipée, qui plonge le lecteur au coeur de la vie d'une plantation coloniale des années 1900, avec ses enjeux économiques, politiques et sociaux. En nous faisant partager la vie de sa grand-mère, planteur dans la colonie française du Sénégal, l'auteur propose un texte à la saveur double?: celle d'une histoire humaine et exotique, et celle, en filigrane, de la société et du monde du début du XXe siècle. Un roman dont l'écriture immerge le lecteur dans un monde coloré et suave. On a parfois la nette impression de regarder les photos de jeunesse de cette grand-mère pas comme les autres.
Dans la seconde moitié du XVIIe siècle, au milieu d'une population rurale héritière de la mentalité du Moyen Âge et des superstitions des anciennes croyances, le recteur d'une paroisse bretonne sauve un enfant abandonné... Homme de conviction et de foi, il lutte pour faire triompher les valeurs chrétiennes de piété et de charité. Dans un climat politique tendu entre l'évêque qui veut créer sa propre milice et les autorités royales qui refusent de l'armer, la population, accablée d'impôts, souffre des épidémies et, en cas de mauvaises récoltes, des famines. Certains commencent alors à dénoncer les privilèges de la noblesse et du clergé. Dans ce contexte difficile, le recteur va aider Yvon à devenir un homme dont le destin entrera dans l'imaginaire breton comme celui d'un Sant.
« Avec le recul qu'impose ma situation à ce jour, et lorsque je déroule l'ensemble du film de ma vie, je m'aperçois alors que l'ensemble de ces détails explique la tournure des étapes qui suivront. Nous sommes tous la somme des choses que nous vivons et très souvent, lorsque nous reprenons rétrospectivement le déroulement de nos vies, on se rend vite compte que chaque événement est la cause du suivant qui n'est autre que la conséquence du précédent... » Le récit débute dans le petit village de Tifra, à la veille de la Seconde Guerre mondiale, et se poursuit à Bejaïa, pour s'achever en France de nos jours. "Ombres & lumières" est le récit de luttes pour obtenir l'indépendance. L'indépendance d'un peuple d'abord, avec en toile de fond la guerre d'Algérie. L'indépendance de deux êtres ensuite, avec leur combat pour se libérer de leur condition. Celle de femme pour Fatima et celle de cadet pour Ayoub, mais aussi celle de pauvres à la merci des plus aisés. Un récit tout en contrastes comme ses personnages profonds et touchants, tantôt sombres tantôt lumineux. Un roman biographique et historique qui nous conte avec tendresse des destins exceptionnels et tragiques.
« Pourtant, pourtant, il aurait tant voulu lui dire de belles choses pour la séduire. Il y avait pensé en venant la chercher, s'étant pratiquement fait d'avance son texte. Il y repensait en retournant chez lui et maintenant, seul, il se remémorait toutes les phrases qu'il voulait lui dire mais dont il avait été incapable de prononcer le moindre mot pendant tout le temps de leur promenade. Il se morigéna, très mécontent de lui-même et se promit que, demain, oui demain, il oserait cette fois lui dire. Mais, lui dire quoi?? »
Un sourd mal-être ronge les jours de Carlo. Lassitude et désenchantement ont pris possession de l'âme de cet instituteur qui se replie sur lui-même quand il n'est pas gagné par de brusques montées de rage. Même son mariage avec Jeanne lui apparaît maintenant dans sa fade réalité: juste un simulacre dont il est à présent prisonnier. Seuls moments où il peut être lui-même: ceux passés avec Karl, étrange ascète qui a investi le vieux bunker caché dans les dunes. Et soudain, comme un rai de lumière qui viendrait percer la grisaille quotidienne: Juliette. Inattendue, inespérée, salvatrice. Elle semble l'attendre à la plage. à un sujet qui aurait pu la maintenir dans les voies étroites du roman purement sentimental, M. Lebeau impose, tout au long du récit, des notes métaphysiques et psychologiques qui aboutissent à bien plus qu'une oeuvre sur la passion adultère. En effet, il est encore question du cheminement d'un homme vers une forme de spiritualité empreinte de symboles. Dans la solitude du grenier où il s'est réfugié, il affrontera ses doutes, ses peurs, ses lâchetés. Bibliothécaire à ses heures, il comprendra que, malgré tous les livres publiés, l'Homme ne sait encore «ni lire, ni écrire» les mystères de l'Univers. Ce roman est aussi la chronique d'un village, avec son bistro, ses boutiques, son école, son cimetière au pied des dunes...
« Daniel avait la vision de plus en plus trouble. Heureusement qu'il s'était souvenu des histoires de son père, la Résistance, l'ancien bras droit de Mémé Battisti, la fuite à Londres via le Portugal... Maurice Saban, une légende selon son père... Il n'osait plus regarder sa blessure depuis une demi-heure. Il avait d'abord senti le liquide visqueux s'écouler en premier dans son entrejambe pour ensuite glisser le long de ses cuisses. Depuis quelques kilomètres, il ne sentait plus rien, même plus son pied sur l'accélérateur. Curieusement, il n'avait jamais eu mal, même au moment de l'impact. Tout s'était bien passé jusque-là : la petite secrétaire de l'ambassade à Paris qu'il lève dans un bar. La fille qui boit trop et qui raconte sa vie pour se faire mousser. Elle est témoin d'un trafic régulier de diamants. Le sentiment qu'il pouvait faire seul le coup de sa vie ! La possibilité de recouper les informations avec Michel, son frère aîné, installé sur place en Afrique du Sud depuis quelques années. » Un trésor de guerre de 1870, la Résistance, un braquage de diamants en 1968, les arcanes de l'aéronautique... Autant de pièces qui viennent dessiner le puzzle aussi riche que complexe d'une fresque familiale pas comme les autres. D'hier à aujourd'hui, entre la France, la Nouvelle-Calédonie et la Chine, Jean-Luc Monceaux joue avec les genres et les destins d'une galerie de personnages finement croqués pour donner naissance à un roman hybride, à mi-chemin entre l'épopée historique, la chronique et le thriller : un cocktail surprenant et accrocheur.
« Certes, elle était noire de crasse, avait la chevelure tout emmêlée et la robe en lambeaux ; les gardes, qui entouraient la carriole, s'amusaient à écarter du bout de leur pique les pans de ce pauvre vêtement, afin qu'on pût apercevoir ce corps souillé par la terre, quand elle s'était débattue pour leur échapper, et par de longs jours d'enfermement sans rien pour s'aiguayer ; mais elle gardait un maintien fier et regardait le ciel d'un oeil pur, sans l'ombre de la peur ou de l'angoisse. Les moines marchaient devant, l'un des vicaires portait une croix sur laquelle un Christ de bois semblait implorer le Très-Haut ; les trois autres psalmodiaient des litanies. Suivaient le sieur de Grélevent, sa famille et ses gens ; et puis des paysans venus des autres villages qu'une malsaine curiosité poussait à venir contempler comment on brûlait le corps d'une sorcière pour que son âme, purifiée des emprises du démon, puisse s'envoler au paradis... Bertrand, soudain captivé par la réalité de l'événement, oublia ses rêves et ses angoisses et regarda de tous ses yeux. » S'il a tôt fait de rejoindre les ordres, le jeune Bertrand finira par quitter la théologie pour se destiner à la médecine alors en plein essor, épaulé par Clément, homme sage doublé d'un savant apothicaire. Un allié de poids dans cette France qui vit encore au rythme des superstitions et du fanatisme, de l'inquisition et des bûchers en place publique... Mêlant la chronique historique au récit initiatique, Daniel Tharaud présente ici le premier tome d'une saga ambitieuse nous plongeant dans un monde déchiré entre le passé et l'avenir, pratiques rétrogrades et découvertes scientifiques.
«?Les deux commères furent très sensibles à son attention, et l'une d'elles, après avoir réfléchi un instant, proposa une action audacieuse. -?Je connais l'endroit... et même le curé, qui ne craint pas d'utiliser nos herbes... Je prépare ma hotte aux miracles, avec mes plantes, mes huiles et mes pots d'un vin qui rend la vigueur... et je pars avec la Bonnette, pour être là-bas avant la nuit. Mon bonhomme nous mènera jusqu'à un quart de lieue de là, avec la charrette, elle servira pour nous ramener les blessés... -?Qu'irez-vous faire là-bas ? -?Les soigner, ces braves gens ! À ma façon... Deux sorcières qui savent guérir les plaies et rebouter les membres démis sont toujours bien accueillies, quel que soit le camp du soldat !?» Bertrand apprend alors qu'il est sollicité en Bourgogne pour veiller sur la santé du peuple et celle de la seigneurie. Malgré le climat tendu causé par la guerre avec l'ennemi anglais, notre médecin accepte la mission et part pour un long voyage où il sillonnera le pays et ses frontières, allant même jusqu'à Bruges en Belgique... Dans le deuxième volet de cette saga, Daniel Tharaud continue d'explorer une France superstitieuse et fanatique. Dans ce pays désormais en guerre, où les blessures et les maladies font chaque jour un peu plus de dégâts, le jeune médecin n'a pas fini de faire entendre parler de lui. Entre sorcellerie et découvertes scientifiques, l'art de la médecine n'a jamais été aussi prisé et mystérieux.
« Et puis cette nuit, lors de ce soudain orage, quand la foudre est tombée sur l'arbre qui a éventré un mur d'une bergerie, une paysanne, dont la ferme est proche, a déclaré avoir vu la Madeleine du Borgne à cet endroit, se livrant à des incantations vers le ciel. Alors la vieille crainte de la sorcière a ressurgi et tout un chacun voulait se faire justicier et châtier la misérable... » La renommée de Bertrand n'est plus à démontrer et ses talents sont appréciés de tous, mais notre médecin doit à nouveau partir. Si la guerre fait régner une peur sans limites dans le pays, la terreur s'invite aussi au château. D'étranges événements s'y produisent. On dit même que les sorcières sont de retour... Déchirée entre croyances et innovations, sorcières et médecins, vie et mort, la saga ambitieuse de Daniel Tharaud trouve ici une conclusion fracassante qui nous laisse sans voix.
« Georges Grégoire m'avait bien prévenue ; il me le disait assez souvent, au début, après la fichue guerre. Il fallait le prendre comme il était. Savoir à quoi m'en tenir avec lui. Le laisser tomber si jamais je devais fléchir et que ma passion pour lui connaisse, à la longue, quelques incertitudes, certaines faiblesses, des peurs bleues et jaunes. Georges Grégoire pour le meilleur et pour le pire... Mais quelle idée a-t-il donc eu de mourir à cinquante ans ? ».
1959. Marguerite, veuve de Georges Grégoire, cohabite désormais avec Julie Ortie. Chacune étant l'opposé de l'autre, elles se retrouvent néanmoins réunies dans le chagrin, la pitié et la prospérité d'un futur évoluant dans l'absence cruelle du mari pour l'une, de l'amant pour l'autre.
Par l'histoire de ces deux compagnes siamoises, Jocelyne Levrier-Thomson parcourt les dernières décennies du siècle passé au fil des changements sociétaux d'une France provinciale, profondément divisée entre libéralisme et traditions. Mêlant romance, psychologie et chronique sociale, Une odeur de mardi s'impose comme une riche étude de moeurs aux portraits de femmes savoureux et terriblement justes.
« L'on peut dire que le feu qui couvait sous la cendre depuis le 14 juillet 1789 n'attendait qu'un fort coup de vent pour se rallumer. La bourrasque arriva les 2 et 3 mars 1793 à Cholet : la révolte de Vendée prenait son départ. » Pour sceller l'amitié de leurs pères, Lucile, fille du comte Georges de Rollin-Carignan et Arnaud, fils du comte François de Valmont, se voient contraints de se marier. De prime abord, le caractère de la jeune femme intrépide et aventurière n'est pas au goût du jeune homme. Alors que son penchant aurait tendance à s'inverser, la guerre éclate et Arnaud de Valmont est appelé au combat. Dans ce roman, Renée Nivelle dresse une fresque historique de la guerre de Vendée, qui eut lieu de 1793 à 1796 et qui opposa l'armée vendéenne des Royalistes et l'armée des Républicains. À travers la romance du jeune couple, l'auteure revient sur cet épisode de l'Histoire de France, qu'elle narre avec un souci du détail certain et dans le respect historique des faits.
Après un tragique accident qui coûte la vie à ses parents, Sandra Brookfield, originaire de Boston, part vivre avec sa tante et son oncle en pleine nature, au nord du Canada. La jeune femme peut s'y adonner avec passion à la peinture. Dotée d'un fort caractère, séduisante et solitaire, elle est courtisée par de nombreux prétendants. Mais l'élu de son coeur ne sera pas un homme comme les autres. Rencontré au détour d'une promenade en forêt, Daniel Saint-Jacques habite seul une cabane en compagnie d'un loup. Comme ses ancêtres, il vit de la chasse et du commerce de la fourrure. Elle tombe amoureuse de ce mystérieux voyageur qui, s'il la sauve à plusieurs reprises de situations périlleuses, ne semble pas la voir. Denys Robidoux entraîne son lecteur dans les terres sauvages d'Amérique du Nord, sur les traces de sa propre histoire familiale. Au contact des Indiens des Plaines de la tribu des Sioux, les trappeurs découvrent avec émerveillement leur habileté dans la préparation des fourrures. Ils entament alors avec eux un commerce fructueux. Le roman conte la manière singulière dont ces hommes vivaient, en parfaite harmonie avec la nature et les peuples autochtones. À la fois histoire d'amour et témoignage authentique sur une fascinante tradition transmise de génération en génération, la vie de ce couple incongru est digne d'un roman.
Matthieu Benjamin est un jeune photoreporter avide de parcourir le monde. Pris dans la tourmente de la Seconde Guerre mondiale, il est mobilisé par l'armée pour rendre compte de la tragédie. Juif communiste, il s'engage dans la Résistance avec sa femme Rebecca. Ensemble, ils surmontent de multiples dangers en se raccrochant à leur soif de vie et à leur amour. Jusqu'au jour où, sur le chemin de l'exil, ils sont surpris par des miliciens... L'auteur brode une fiction vivante mettant en scène des personnages imaginaires sur une toile de fond historique. S'appuyant sur la mémoire collective de son lectorat, l'auteur fait s'entrecroiser les péripéties romanesques avec des événements marquants du vingtième siècle. Il retrace avec empathie le traumatisme d'un homme courageux dont le destin a été broyé par l'horreur de la guerre.
« Il doit bien rester quelques traces de cet homme dont la brève trajectoire a tout de même marqué les esprits, puisque je suis en train de m'interroger à son sujet, cent ans après sa mort. Je rentrai et, armé d'une bière bien fraîche et d'un paquet de biscuits, montai au grenier où il me semblait bien, à mon arrivée dans la maison familiale, avoir déversé en vrac dans quelques boîtes l'essentiel des archives Méline. » Yves Richer veut sortir de l'oubli la mémoire de son illustre aïeul Alcide Méline, engagé volontaire pendant la Première Guerre mondiale. Tel un détective, il rassemble, un siècle plus tard, des éléments lui permettant de reconstituer l'histoire de son grand-oncle et les circonstances troubles de sa disparition. La découverte de son livret militaire ainsi que la lettre d'un certain Théophile Boudeau constituent de précieuses sources d'information sur le quotidien du soldat. À travers le filtre de la fiction, l'auteur réhabilite le souvenir d'un héros converti en agent secret pour défendre sa patrie. Les reproductions d'archives de l'époque disséminées au fil du récit lui confèrent une dimension de réalité supplémentaire.
« Devant le second pylône, Simon s'épanouit car, sur le socle d'un colosse qui semble en garder l'entrée, son oeil exercé retrouve les hiéroglyphes déjà aperçus sur les sphinx de l'allée et à Louxor. Revenant sur ses pas en direction du sud, il montre à Jean l'allée de sphinx à tête de bélier conduisant au temple de Louxor. Ces bêtes sont représentées assises, sur un socle sans inscription, les deux pattes de devant repliées ; la sculpture est d'un grand réalisme et d'une grande majesté : les pattes sont munies de leurs sabots et la laine de leur corps est curieusement semblable à des écailles. Mais ce qui surprend, c'est qu'elles ont toutes été décapitées et que leurs belles têtes aux cornes puissantes, d'un arrondi parfait, exprimant une paix et une majesté tout humaines, gisent à quelques mètres d'eux, comme si un ennemi, d'un geste sanguinaire, avait voulu se venger de leur puissance. » Simon part en 1798 en Égypte avec l'expédition de Bonaparte. Rescapé de la bataille navale d'Aboukir, des émeutes du Caire, de la guérilla en haute Égypte, il succombera... aux attraits d'une civilisation dont la clef lui échappe. C'est à corps et âme qu'il se lancera à la recherche du tombeau d'Aménophis III, quitte à y laisser la vie... S'inspirant d'Édouard Devilliers du Terrage, Jean-Baptiste-Prosper Jollois et Édouard René, le trio que réinvente Nicole Barbecot-Thevenet autour de Simon, Antoine et Jean nous embarque avec une passion sans commune mesure au pays des pharaons. Mêlant adroitement fiction et réalité historique, l'auteur signe un roman d'aventures au parfum aussi authentique que mystérieux.
« Ayant pris conscience que la maladie comme la vieillesse sont des écoles de la patience et de la sagesse... Paradoxalement, la douleur qui est devenue son ennemie (la toute première dans sa vie), il s'en est fait une alliée, une conseillère... ''Sois prudent Janga ! lui souffle-t-elle, tu sais combien la camarde souhaite ton péril ! Ralentis et observe mieux ton environnement, il t'est interdit de chuter !'' » Le deuxième tome des chroniques autobiographiques de Jean-Garib déborde d'un appétit de vivre contagieux. Il surmonte les désagréments causés par son handicap en écrivant ses mémoires, porté par une ardente énergie créatrice. Après un détour par le Maroc, l'instituteur revient enseigner dans le petit village de son enfance, dans l'Hérault. Né dans une famille de viticulteurs, il reconstitue l'atmosphère chaleureuse qui y règne durant sa prime jeunesse, le quotidien basé sur l'entraide et la proximité avec la nature. Cet amateur de néologismes s'approprie la langue française, jamais à court d'idées pour la modeler à son goût. Son témoignage plein d'humour au volontarisme salvateur offre un message d'espoir pour tous.
Amata a neuf ans, mais si son enfance est terminée, elle n'aura le droit de devenir femme qu'après avoir consacré trente années au culte de la déesse Vesta. Choisie et donc honorée, la jeune Romaine devra apprendre la vie dans cette prison dorée. En s'éprenant d'un licteur, Amata la bien nommée saura-t-elle échapper au sort tragique réservé à tant d'autres avant elle ? S'éloignant de la science-fiction de son oeuvre précédente, Souad El Mesbahi poursuit pourtant certaines thématiques d'Imago. S'attaquant de nouveau au déterminisme et au destin des élus, son dernier opus nous plonge dans l'Antiquité et convoque les spectres de figures connues, telle la vestale Sextilia enterrée vive pour adultère... Bâti autour d'une histoire d'amour a priori impossible, ce récit choral explore ainsi la condition de la femme et dénonce les rouages d'un système patriarcal dont l'on reconnaît sans mal l'héritage aujourd'hui encore.
« L'Algérie est un pays pris depuis longtemps dans le roulis constant d'un navire en pleine mer. Ceux qui s'y trouvent vivent constamment la tête penchée par-dessus bord, vomissant leur bile, et ceux qui y débarquent gardent à jamais une démarche chaloupée, ne sachant plus sur quel pied se poser. À ses yeux, c'est peut-être cela la juste définition du pied noir. » Ginette, pied-noir d'Algérie, a été contrainte à l'exil au lendemain de l'indépendance, laissant derrière elle, au-delà d'un pays, sa meilleure amie Khdîdja. Les deux femmes avaient gardé l'espoir de se revoir. Malheureusement, la maladie et la rancoeur des hommes eurent raison d'elles... Ginette donna naissance à Rosa, d'un premier mariage avec Raymond, décédé lors de la guerre de libération. L'adolescente éprouvera de grandes difficultés existentielles en lien avec ses origines, la mort de son père et leur départ. Puis naquit Saïd d'une seconde union avec Madjid. Leur enfant trouvera son équilibre dans des missions humanitaires, aux confins de l'Afrique. Quant à Khdîdja, veuve depuis la guerre de libération et mère de deux enfants, Amel et Sid, elle maudira le sort que leur a réservé une indépendance bâillonnée, et un avenir incertain qui poussera, hélas, son fils Sid à se ruer dans les bras sanguinolents de l'islamisme. Un roman riche d'Histoire et d'émotions, avec des personnages aux tourments émouvants qui, malgré d'âpres combats, maintiennent l'espoir grâce à l'amour et à l'amitié.